lundi, 31 mai 2004
Sur la communisation - R.S.
Essayer de définir la communisation, c’est s’attaquer à un concept en formation. Plus qu’élaborer une définition, il s’agit plutôt d’en délimiter les angles d’attaque.
Le programmatisme est caduc
Mon point de départ est le concept de programmatisme. Le programmatisme repose sur une pratique et une compréhension de la lutte des classes dans laquelle une des classes, le prolétariat, trouve, dans sa situation, la base du dépassement de la contradiction et de l’organisation sociale future. Son activité dans la lutte des classes et cette organisation deviennent alors un programme à réaliser. Dans la lutte des classes entre le prolétariat et le capital, le prolétariat est l’élément positif qui fait éclater la contradiction, la révolution est alors l’affirmation du prolétariat : dictature du prolétariat, conseils ouvriers, période de transition, Etat dégénérescent, autogestion généralisée, « société des producteurs associés », etc. La résolution de la contradiction est donnée comme un des termes de la contradiction. Le prolétariat est investi d’une nature révolutionaire qui le fait être contradictoire au capital, qui se module selon les conditions historiques plus ou moins mûres et qui se déclinent comme éléments d’un programme. Cette contradiction n’est plus alors le rapport social capitaliste lui-même, que le prolétariat, de par sa situation dans le rapport, est amenée à abolir.
Le programmatisme n’est pas seulement une théorie, il est avant tout la pratique du prolétariat dans laquelle la montée en puissance de la classe dans le mode de production capitaliste (de la social-démocratie à l’Ultra-gauche) est positivement le marche-pied de la révolution et du communisme qui ne sont que la transcroissance et l’achèvement de cette montée en puissance. Il est la pratique du prolétariat du début du XIXème s. jusqu’à la fin des années 60. Cependant, lié de façon essentielle à la subsomption formelle du travail sous le capital, il se « décompose » dans la première phase de la subsomption réelle.
C’est à cette situation que met fin la restructuration du mode de production capitaliste engagée dans les années 70, et c’est une nouvelle structure et un nouveau contenu de la contradiction entre le prolétariat et le capital, l’exploitation, qui définissent maintenant un nouveau cycle de luttes. Ce n’est donc pas à partir d’une nature immuable de la révolution et du commmunisme qui aurait été plus ou moins brièvement et totalement approchée au cours de l’histoire que je parlerai de la communisation, mais à partir de cette nouvelle situation.
Restructuration et nouveau cycle
De la façon la plus succcinte, je définis le résultat de la restructuration comme la contradiction entre le prolétariat et le capital se nouant au niveau de la reproduction du mode de production donc de la reproduction des classes et de leur rapport. En conséquence, le prolétariat, en contradiction avec le capital, dans le cadre de l’exploitation, ne produit plus dans ce rapport aucune confirmation de lui-même face au capital. L’enjeu de la lutte de classe est, dans sa contradiction au capital, sa propre remise en cause, sa propre abolition. Il en résulte une situation proprement renversante. D’une part, le prolétariat ne lutte quotidiennement et n’est une classe révolutionnaire que dans sa stricte définition en tant que classe de ce mode de production ; d’autre part, la limite de toutes ses luttes actuelles se ramène toujours au fait d’être une classe et d’agir en tant que telle. C’est la dynamique et simultanément la limite de ce cycle de luttes.
En décembre 95, dans la lutte des sans-papiers, des chômeurs, des dockers de Liverpool, de Cellatex, d’Alstom, de Lu, de Marks and Spencer etc., telle ou telle caractéristique de la lutte apparaît, dans le cours de la lutte elle-même, comme limite en ce que cette caractéristique spécifique (service public, demande de travail, défense de l’outil de travail, refus de la délocalisation, de la seule gestion financière, etc.), contre laquelle le mouvement se heurte, souvent dans les tensions et les affrontements internes de son recul, se ramène toujours au fait d’être une classe. Si, dans ce cycle, la limite de chaque lutte c’est fondamentalement le fait d’agir en tant que classe, la limite est alors inhérente et existera nécessairement toujours de façon spécifique à la lutte et selon les modalités de la reproduction du mode de production capitaliste dont le prolétariat est une classe (il n’en était pas ainsi tant que le prolétariat pouvait opposer au capital une réorganisation de la société sur la base de ce qu’il était dans cette société).
Si nous pouvons quotidiennement constater que chaque lutte bute sur ce qui la constitue comme action de classe, il en va autrement en ce qui concerne la transformation de cet « agir en tant que classe », devenu limite, en remise en cause par le prolétariat de son propre rapport au capital : la communisation. C’est-à-dire la transformation de quelque chose qui, pour l’instant, se résoud dans la reproduction du capital en quelque chose qui soit activement, dans la lutte de classe, la remise en cause par le prolétariat de sa propre situation de classe. Nous en avons eu des aperçus fugitifs dans le « mouvement d’action directe », dans la lutte des chômeurs et précaires, nous en avons un indice au travers des transformations de la composition de classe du prolétariat mais la « remise en cause » est encore largement une déduction théorique.
Déduction effectuée sur la base :
de l’effondrement de toute perspective de montée en puissance, d’affirmation et de libération du prolétariat.
de la limite actuelle de toutes les luttes dans le fait même d’être lutte de classe. Limite qui est la dynamique de ces luttes.
de la recomposition du prolétariat.
du contenu et de la structure de la contradiction entre le prolétariat et le capital restructuré (contradiction au niveau de la reproduction : être en contradiction avec le capital, c’est être en contradiction avec sa propre reproduction comme classe).
A partir du moment où la lutte des classes se situe au niveau de la reproduction, c’est dans n’importe quelle lutte que le prolétariat ne peut, ni ne veut, rester ce qu’il est. Il ne s’agit pas forcément de déclarations fracassantes oud’actions « radicales », mais de toutes les pratiques de « fuite » ou de dénégation par les prolétaires de leur propre condition, les luttes suicidaires à la Cellatex, la grève de Vilvoorde et bien d’autres où éclate que le prolétariat n’est rien séparé du capital et qu’il ne peut demeurer comme ce rien (qu’il réclame sa réunion avec le capital ne supprime pas l’abîme qu’ouvre la lutte, la reconnaissance et le refus par le prolétariat de lui-même comme cet abîme). Dans le cours actuel des luttes, si la remise en cause n’est encore qu’une déduction théorique c’est qu’elle est aussi beaucoup plus que cela.
Le cycle de luttes actuel est la résolution de l’énigme de la lutte de classe : comment une classe agissant strictement en tant que classe peut-elle être l’abolition de toutes les classes. Cette résolution, c’est la communisation telle qu’on la déduit de ce cycle de luttes.
La révolution est immédiateté du communisme
L’essentiel du concept de communisation tient en un seul point : la révolution comme abolition du capital n’est pas un préalable à l’instauration du communisme, elle ne peut réussir qu’en étant l’instauration immédiate du communisme.
Dire qu’il y a des problèmes qui ne se résoudront pas « du jour au lendemain » c’est vrai, ils sont bien réel. Que le communisme ait à résoudre dans un premier temps des problèmes que lui lègue le capitalisme (inégalités de développement, transformation qualitative des instruments de production, élimination d’installations dangereuses, déconcentration de la population, suppression dans ses formes matérielles - inscrites dans l’espace - de l’opposition entre villes et campagnes, « réhabilitation » d’anciens espaces agricoles ou « naturels ») ne crée pas pour autant une période ou des activités où il ne « fonctionnerait » pas selon ce qu’il est, d’après sa nature propre, et cela jusqu’à ce que soit atteint un certain niveau de développement qui est en définitive absolument infixable. Le communisme n’est pas la fin de l’histoire, il a des problèmes à résoudre hérités du mode de production capitaliste et peut-être même, en cette occasion de rupture avec toute l’histoire antérieure de l’aliénation, des problèmes hérités de mode de production antérieurs (la question mériterait d’être soulevée). Il posera lui-même ses propres problèmes, génèrera des antagonismes et des dynamiques, ces problèmes et cette dynamique relevant de la tension à l’autonomisation de la communauté dans la mesure où l’immédiateté sociale de l’individu est un ensemble de rapports et non une essence inhérente à chaque individu. C’est dans ce rapport entre la tension à l’autonomisation de la communauté et la diversité que le communisme existe et se projette comme histoire. Le communisme est la communauté humaine en construction permanente et en tension permanente entre l’universalité et la diversité parce qu’elle ne possède pas d’étalon abstrait entre les activités diverses (en cela également le communisme n’est pas une énième version de la « société transparente »). Mais quels que soient ces problèmes, ceux dont il hérite ou les siens propres, il fonctionnera d’emblée sur ses propres bases, sinon il ne sera pas. Avec la révolution, c’est toute détermination sociale préalable comme contrainte à reproduire (l’appartenance de classe), c’est toute présupposition antérieure à reproduire, antérieure aux rapports que les individus, en tant qu’individus, définissent entre eux, en même temps qu’ils définissent leurs besoins, la satisfaction de ceux-ci et les modalités de cette satisfaction, qui sont abolies. L’abolition des classes signifie tout autant l’abolition de l’activité comme subjectivité, que de son produit comme objectivité face à elle, c’est en cela que l’abolition du travail salarié est abolition du travail. L’abondance que crée la révolution communiste n’est pas de l’ordre de l’avoir mais de l’être ensemble, de la communauté. Tout cela se produit dans le mouvement même de la révolution, c’en est même le contenu.
Quand on a des problèmes avec les premiers temps du communisme et que l’on commence à faire le « réaliste timoré » avec des expressions du genre « ce n’est pas du jour au lendemain », c’est que l’on a des problèmes dans la conception de la révolution qui demeure conçue sur la base fournie par un développement objectif des forces productives, dont le prolétariat, et de leur libération de la mesquinerie capitaliste. En fait, ce que l’on considère la plupart du temps comme des questions à résoudre dans les premiers temps du communisme, ne sont le plus souvent que des mesures communistes que les prolétaires révolutionnaires devront prendre dans le cours de la révolution, en ce que cette dernière n’est pas le communisme contre le capital, mais la production du communisme médiée par son opposition réelle au capital. Mesures pragmatiques et tactiques dans le cours de la révolution. Abolir la valeur ou l’Etat, créer de nouveaux rapports ayant pour contenu l’immédiateté sociale de l’individu, c’est-à-dire la relation entre individus dans leur singularité, sont des mesures tactiques de combat des prolétaires en révolution contre le capital.
L’immmédiateté n’est pas un immédiatisme
Mais attention, lorsque du doigt nous traçons sur la carte le chemin à parcourir, nous ne sommes pas pour autant parvenus au but ; c’est dans la lutte des classes de ce cycle de luttes que l’énigme se pose et doit être résolue. L’immédiateté du communisme n’est pas son immédiatisme.
L’immédiatisme de l’alternativisme ou du « mouvement d’action directe » sait très bien que la lutte des classes est primordiale, mais il attend de cette lutte que les ouvriers n’agissent plus en tant que tels pour être révolutionnaires. Or, la communisation de la société ce sera des mesures communistes prises par des ouvriers parce qu’ils sont ouvriers, parce qu’en tant que tels ils existent définis dans et contre toutes les déterminations du capital. L’immédiatisme suppose que la transformation de la société ne serait possible qu’après que les prolétaires aient abandonné leurs vieux habits de prolétaires. Il envisage la communisation comme une « longue marche » dans le mode de production capitaliste. L’immédiatisme ne peut s’achever que dans l’alternative. On perd le concept même de communisation si l’on ne considère pas que la production du communisme s’effectue parce que les prolétaires, en lutte contre le capital comme prolétaires, abandonnent, dans cette lutte, leurs vieux habits de prolétaires, parce qu’ils sont immergés dans les contradictions du capital qui les constituent comme prolétaires. L’abolition de la condition prolétarienne est l’auto-transformation des prolétaires en individus immédiatement sociaux, c’est la lutte contre le capital qui nous fera tels, parce que cette lutte est une relation qui nous implique avec lui. La communisation ne se constitue pas en mode de vie face au capital, mais sera le dépassement des luttes revendicatives dans le cadre immédiat du travail ou de la reproduction de la force de travail, c’est-à-dire dans le cadre de l’exploitation. La révolution n’est ni la révélation d’une nature révolutionnaire du prolétariat toujours déjà là, ni le résultat du face à face de deux mondes : celui du capital et celui de l’alternative communiste se constituant face à lui. Si la révolution est le dépassement du mode de production capitaliste produit par le développement historique de la contradiction entre le prolétariat et le capital, cela signifie qu’elle est soumise au développpement des contradictions de classes de cette société, à leur histoire. La question de la communisation est sous sa forme la plus concrète celle de la relation entre ce cycle de luttes et la révolution.
Du cycle de luttes actuel à la communisation
Dans chaque cycle de luttes le cours quotidien de la lutte de classe produit s’articule à la révolution de façon spécifique, soit comme transcroissance (dans le cadre du programmatisme), soit comme dépassement produit dans le cycle actuel.
Dans ce cycle de luttes, le cours quotidien de la lutte des classes donne forme à la contradiction telle qu’elle devient et se structure dans la crise et la révolution. Ce nouveau cycle a des caractéristiques fondamentales qui le différencient radicalement du programmatisme : la disparition de l’identité ouvrière, le fait que toute lutte trouve dans ce qui la définit sa propre limite comme reproduction du capital (limites que cette reproduction lui signifie chaque fois de façon spécifique, selon ses propres caractéristiques), le fait qu’affronter le capital c’est affronter sa propre constitution en classe. C’est de par ces caractéristiques mêmes du cours quotidien que la crise de ce rapport contradictoire entre le prolétariat et le capital peut devenir communisation. La communisation est l’achèvement / dépassement du nouveau cycle de luttes, déterminé par le contenu de celui-ci : la contradiction au niveau de la reproduction du rapport, la coalescence entre la constitution en classe du prolétariat et sa contradiction avec le capital, la disparition corollaire de toute identité ouvrière. La contradiction entre les classes est devenue la “condition” de sa propre résolution comme immédiateté sociale de l’individu.
Cependant ce n’est pas à une nature révolutionnaire que nous avons affaire, mais au cours de la contradiction entre le prolétariat et le capital, telle qu’elle est le cours quotidien de la lutte des classes et le cours dynamique des contradictions du capital. Elle constitue et nécessite la crise de la reproduction capitaliste comme médiation à son dépassement. Cela, parce que la contradiction devient nécessairement économie dans son procès, sous une forme historique chaque fois spécifiée. Le capital se reproduit et donc l’économie existe, sa crise ne sera pas autre chose que la crise économique, mais la crise économique est la crise du rapport social, une crise du rapport d’implication réciproque. Cela n’a rien à voir avec l’affirmation selon laquelle la crise ne sera pas qu’économique mais aussi sociale, aussi politique etc. La crise de ce cycle de luttes, en tant qu’elle est crise du rapport social capitaliste, inclut une activité de la classe capable d’être communisation. Il ne s’agit pas de quelque chose qui est donné d’emblée et qui imposerait sa nature à la crise, mais bien de la pratique du prolétariat dans cette crise
Cependant, la relation entre les luttes actuelles et la révolution doit être approchée à l’intérieur de l’activité de la classe. Nous savons qu’il ne s’agit pas d’une transcroissance, mais si nous n’abordons pas cette question en tant qu’activité de la classe, nous conférons à la crise un rôle démiurgique, en ne la concevant que comme crise du capital modifiant l’activité de la classe, modification qu’elle ne fait alors que subir. Quel est du point de vue de l’activité de la classe, le contenu de ce passage, de ce dépassement ?
La communisation est le dépassement produit de ce cycle
La révolution est un conflit entre les classes, elle est la détermination ultime du procès contradictoire du capital comme contradiction entre le prolétariat et le capital. Le procès de dépassement de la lutte revendicative s’amorce dans la lutte revendicative elle même, lorsque celle-ci, à l’intérieur d’elle-même, pose ses exigences sans tenir compte de la logique de reproduction du système et, par là, tend à remettre en question les conditions mêmes de l’existence de l’exploitation. C’est-à-dire simplement lorsqu’elle devient, dans son cours de lutte revendicative, jusqu’au-boutiste, dépassant par là sa cohérence de lutte revendicative.
Se trouver dans une situation, où c’est l’abolition de la société dans laquelle nous sommes nous mêmes engagés qui devient l’objectif du mouvement, de plus dans une situation sociale où en nous-mêmes, que ce soit comme salariés, prolétaires ou travailleurs, on ne peut plus se conférer une identité à libérer contre cette société, un projet de réorganisation de celle-ci sur la base du salariat ou du travail producteur de valeur, se trouver dans cette situation et agir en conséquence, c’est là que s’amorce la communisation. Cela signifie que l’appartenance de classe qui était nécessité, définition sociale préalable à reproduire parce qu’impliquant sa reproduction, devient contingente. Toute grève, toute lutte n’est pas potentiellement la révolution, mais nous ne pourrons jamais définir à l’avance le moment où la lutte revendicative produit son propre dépassement.
Ce dépassement de la contradiction entre les classes est le moment où lutter contre le capital, devient, dans le cours de la lutte, remettre en cause sa propre condition de prolétaire qui est alors produite, dans le cours du conflit, comme une contrainte extérieure, en même temps que c’est en tant que prolétaire que l’on se bat contre le capital et que simultanément on produit des rapports nouveaux. On communise la société, c’est-à-dire qu’on la supprime en tant que substance autonome du rapport entre les individus, qui se rapportent à eux-mêmes dans leur singularité. Les rapports sociaux antérieurs, sans que cela tienne à un plan d’ensemble (inexistant et impossible), se délitent dans cette activité sociale où l’on ne peut faire de différence entre l’activité de grévistes et d’insurgés et la création d’autres rapports entre les individus, de rapports nouveaux, dans lesquels les individus ne considèrent ce qui est que comme moment d’un flux ininterrompu de production de la vie humaine.
A partir de là, ce dépassement n’est pas un processus interne à la classe, mais son conflit avec le capital et l’évolution des rapports de forces, donc des objectifs et de la conscience théorique qui se déterminent dans la lutte. La communisation est soumise à l’histoire de l’accumulation du capital et à sa crise. Qu’est ce qui peut faire de cette crise une crise finale ? Rien d’autre que son déroulement, et non l’accomplissement d’un sens ou d’une tendance. C’est la crise du mode de production capitaliste dans les termes du mode de production capitaliste résultant de la baisse tendancielle du taux de profit, contradiction entre des classes (c’est en cela que la question souvent posée : “jusqu’à quel point devra-t-il baisser ?”, n’a pas de sens.). Ce n’est pas l’irreproductibilité de cette contradiction qu’est l’exploitation qui produit la communisation. C’est le dépassement d’un cycle de luttes spécifique et la pratique du prolétariat qui en résulte alors comme pratique dans cette crise qui se définissent comme communisation, rendant la contradiction entre le prolétariat et le capital irreproductible.
Le dépassement de la situation du prolétariat est la définition du communisme
L’immédiateté sociale de l’individu, cela signifie fondamentalement l’abolition de la division de la société en classes, scission par laquelle la communauté est étrangère à l’individu. On peut alors approcher positivement ce que sont les individus immédiatement sociaux, ou plutôt ce que sont les rapports d’individus immédiatement sociaux dans leur singularité. Leur auto-production dans leurs rapports réciproques n’implique jamais une reproduction dans un état qui serait une particularisation de la communauté, ce qui est impliqué par la division du travail, la propriété et les classes. Les individus immédiatement sociaux traitent consciemment tout objet comme activité humaine et dissolvent l’objectivité en un flux d’activités (dépassement du prolétariat comme dissolution de la propriété sur la base de la propriété) ; ils traitent leur propre activité comme particularisation concrète de l’activité humaine (dépassement du prolétariat comme dissolution de la division du travail sur la base de la division du travail) ; ils considèrent pratiquement leur production et leur produit, dans leur coïncidence, comme étant leur propre fin en soi et incluant leurs déterminations, leurs possibilités d’effectuation et leurs finalités (dépassement du prolétariat comme dissolution de l’échange et la valeur) ; et finalement ils posent la société comme étant à produire constamment dans le rapport entre individus, et chaque relation comme prémisse de sa transformation (dépassement du prolétariat comme dissolution des classes).
Dans tout cela, nous retrouvons le prolétariat comme dissolution des conditions existantes sur la base, dans le mouvement, de ces conditions. A partir de là, en un moment historique particulier, nous trouvons sa capacité à traiter sa propre définition comme classe comme une contrainte extériorisée, dans le capital, contre lui. Tout ce que nous pouvons dire de la communisation (et du communisme) découle de ce que le prolétariat est dans son rapport au capital, par là elle est un moment de l’histoire de ce rapport. Comment une classe agissant strictement en tant que classe peut-elle abolir les classes ? C’est dans l’histoire du mode de production capitaliste, comme contradiction entre le prolétariat et le capital, que nous devons chercher, par bribes, la résolution de l’énigme.
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