French translation of Practice and ideology in the direct action movement.
« L’appel à abandonner leurs illusions sur leurs conditions est un appel à abandonner une condition qui requiert des illusions »
Les récentes explosions de colère (comme à Seattle en novembre ou dans la City à Londres le 18 juin [J18]) se sont exprimées d’une manière indigne de leur pratique radicale. Le contenu radical de leur pratique (comme la violence contre la police, la destruction de propriété, le sens d’une force collective contre l’Etat) s’est accompagnée d’une image déformée du capitalisme, qui insiste en voyant le capital comme rien de plus que les centres financiers, les entreprises « crapuleuses » (comme s’il y avait des entreprises « non crapuleuses ») et de vagues organisations internationales (comme l’OMC, le FMI, la Banque Mondiale, etc). Ils identifient le capital avec ses apparences les plus superficielles, en manquant de le voir dans sa totalité. D’un autre côté, ces actions inspirent entièrement les personnes qui s’y investissent, ils causent un trouble considérable pour les chiens de garde de la loi et de l’ordre, et ils perturbent la routine du business quotidien des marionnettes qui en sont la cible. Le problème apparaît là immédiatement : comment est-ce que le langage réformiste des manifestants peut-il coexister avec leur pratique subversive ?
En un sens, ces deux choses ne sont pas contradictoires. Les mouvements ne sont jamais homogènes (dans la pratique ou la théorie) mais sont plutôt constitués de contradictions et de limites immédiates, qui peuvent être potentiellement dépassées avec le développement du mouvement. De plus, quelque soit la façon dont le langage officiel d’un moment représente son contenu, il n’existe pas d’homogénéité : les personnes qui pratiquent des réappropriations et des actes violents de désordre ne sont pas nécessairement les mêmes qui établissent l’idéologie qui sous-tend les actions. En même temps, contrairement aux apparences, il n’y a rien de fondamentalement contradictoire entre avoir le désir de détruire le monde existant et ses vitrines, et avoir des idées erronées sur ce même monde. L’histoire du mouvement révolutionnaire contre le capitalisme est rempli d’exemples de telles tendances.
Mais l’explication ci-dessus se fond facilement en une forme d’excuse problématique, spécialement lorsqu'elle est utilisée pour éluder toute critique radicale de ces luttes. Dans nos deux numéros précédents, nous avons porté ce qui a ensuite été qualifié d’attaques sévères et injustes sur la théorie exprimée lors des événements qui se sont déroulés le 18 juin. Nous avons été principalement attaqués pour avoir été trop expéditifs, arrogants et « idéalistes » à propos du J18. Certaines de ces critiques étaient justes. Notre analyse était en fait concentrée sur l’idéologie exprimée par le mouvement et pas sur son contenu réel. Il serait certainement plus exact et plus complet de regarder vers l’histoire du mouvement qui a inspiré les actions comme le J18 et d’avoir une approche plus radicales de ses limites.
Cependant, et sans entrer dans l’argumentation sur les limites de notre critique par rapport à la pratique et au mouvement lui-même (après tout, nous l’avions écrite avant le J18, et nous ne pouvions pas savoir exactement comment cela se déroulerait), cette critique a depuis été largement confirmée. Au regard des expressions radicales, comme les actions du J18 et de « la bataille de Seattle » 1, la plupart de ces critiques finissent par écarter toute critique sur l’idéologie du mouvement, c’est-à-dire une partie de son contenu. Dans leur tentative de réagir contre notre critique, le résultat final est plutôt une approche a-critique de ses expressions réformistes et réactionnaires de ce mouvement. Il ne s’agit pas de lui trouver des excuses. La critique radicale n’a pas pour objet d’échanger des compliments mais plutôt de regarder les limites de mouvements qui proclament leur anti-capitalisme, et de contribuer à leur développement. L’objectif de suraccentuer les côtés « séduisants et inspirés » est bien mieux rempli par les différentes conférences et réunions de l’action directe, dont l’unique objet semble être ceci : de grandes doses d’auto-assurance et l’absence d’esprit critique.
Le mouvement de l’action directe a d’abord émergé avec les luttes contre les routes au début des années 90. En développement une réponse aux tentatives d’adaptation des besoins émergeants du capital sous forme de schémas ambitieux de constructions routières, le mouvement anti-routes était une lutte à la fois ancienne (une réminiscence des tentatives paysannes de résister à l’accumulation primitive du capital à travers des occupations de terrains) et contemporaines (en résistant aux besoins du développement capitaliste dans les pays avancés — Europe de l’Ouest).
Malgré ses incohérences et des dissensions internes, le mouvement anti-routes a exprimé un côté de la lutte des classes. Il l’a fait en attaquant (la théorie) l’idéologie du progrès capitaliste, et en résistant (la pratique) aux tentatives d’accentuer la séparation entre les gens et leur environnement immédiat, ceci par sa transformation en espace mort dont l’unique objet est de faciliter la dictature de l’économie. Pour ceux qui prennent part à ces luttes, le potentiel pour dépasser ses limites immédiates fut visible — et pour beaucoup, ceci fut réalisé. Le progrès scientifique 2, le filtre idéologique de la justification de la modernisation capitaliste, a été dénoncé comme plongeant ses racines dans les intérêts du capital. La démocratie, la puissante idéologie du capital y fut (en pratique du moins) rejetée et remplacée par l’action collective. Beaucoup de plans apparemment sans fin pour créer des autoroutes ont été grandement retardés et, dans certains cas, abandonnées.
Dans son processus de développement, le mouvement anti-routes a créé une communauté de lutte contre le capital et l’état, mais — comme on peut l’observer aujourd’hui — il s’agissait uniquement d’une petite île dans le désert capitaliste. Aussi inspirées et créatives qu’aient pu être le communautés de lutte du mouvement anti-routes, elles furent basées de façon problématique sur les limites du mouvement écologiste (sans parler de la « sous-culture » et du mode de vie3). Même si des liens positifs furent tissés dans certains cas avec la population locale, ils n’ont jamais essayé de dépasser la nécessité immédiate et de se diriger vers la création d’une base à long terme pour les luttes anti-capitalistes.
Malgré sa relation antagonique avec la modernisation capitaliste, le mouvement anti-routes fut incapable de briser son isolement et de se transformer en un mouvement généralisé qui aurait pu relier le mouvement écologique (en dépassant son réformisme inhérent) au mouvement général contre le capital dans son ensemble. Comme c’est habituellement le cas avec les mouvements qui échouent à formuler leur critique historique, le mouvement de l’action directe est aujourd’hui incapable de comprendre que ses fondations reposent sur le résultat aliéné des luttes qui ne tentent jamais de contester la réalité capitaliste dans son ensemble. Basé sur le cadavre de la « sous-culture » et d’un style de vie, le mouvement de l’action directe est en train de rajeunir des idéologies qui étaient déjà fausses lorsqu’elles sont apparues pour la première fois. Il échoue à comprendre ses contradictions intrinsèques, en remplaçant la critique par un enthousiasme — presque — incompréhensible.
Les gens ont essayé de surmonter les problèmes arrivant dans le milieu de l’action directe en déclarant qu’il s’agissait principalement d’un problème de rapport entre théorie et pratique. Les deux ne sont bien sûr pas séparées. Quiconque déclare que les interventions « théoriques » sont inférieures à celles qui relèvent de la « pratique » est soit stupide, soit paternaliste. Les deux se complètent ou sont toutes deux utiles. Donner une priorité à l’une sur l’autre revient tout simplement à diviser notre lutte contre le capital et à justifier la division du travail existante, qui donne une raison d’être aux nombreux « révolutionnaires professionnels ». Les problèmes rencontrés par le milieu de l’action directe ne sont pas, à cet égard, le résultat d’une contradiction entre théorie et pratique. La pratique et la théorie du mouvement de l’action directe sont toutes deux les reflets de la situation présente, qui est d’abord caractérisée par l’absence d’un vaste mouvement de contestation de la normalité capitaliste. Avec un tel environnement, il n’est pas surprenant que le mouvement de l’action directe semble bloqué dans ses contradictions.
La tendance, spécifiquement dans les périodes non-révolutionnaires, est d’applaudir à toute confrontation violente entre les prolétaires et l’Etat. Et si cela est justifié d’une certaine façon, c’est aussi pour beaucoup d’entre nous un échappatoire à une vie organisée dans la routine qui n’offre rien de bien intéressant. Cependant, cette tendance porte en elle le danger de fétichiser des expressions incomplètes de notre lutte et ainsi de perpétuer leur existence de façon incomplète. Organiser des « journées contre le capitalisme », même si c’est en soi une avancée dans le supermarché des problèmes partiels contre lesquels une grande partie du mouvement de l’action directe est impliqué, n’est rien d’autre que l’expression de notre incapacité à attaquer le capital à ses racines de façon systématique. Le capital est une relation sociale, et porter notre lutte contre lui, c’est la centrer sur notre vie quotidienne ou ça n’est rien. Le seul usage des « journées contre le capitalisme » est qu’elles offrent une chance à beaucoup d’entre nous de se rencontrer en dehors des structures politiques et d’exprimer collectivement notre dégoût du monde existant 4. Mais c’est bien tout. Même si cela peut être positif, cela ne signale en tout cas pas en soi l’émergence d’un « mouvement anti-capitaliste ».
Le mouvement qui a existé autour d’événements comme le J18 et Seattle est largement déconnecté des luttes existantes contre l’offensive que mène le capital contre nous 5. Bien que le milieu de l’action directe ait repris le terme d’« anti-capitalisme », et bien que cela puisse être d’une certaine façon une avancée, c’est un lieu de commun de dire que le capitalisme est essentiellement un système de production. Aucune des actions « séduisantes et inspirées » qui se sont placées sous la bannière de l’anti-capitalisme n’ont été le moins du monde centrées sur le procès de production. A la place, le centre d’intérêt fut le capital financier, les institutions monétaires internationales et l’opposition illusoire entre « commerce libre » et « commerce équitable ». Les « cibles » que le milieu de l’action directe avait choisies ainsi, représentaient les mécanismes du capital pour réguler des décisions déjà prises au niveau du procès de production.
Nous ne sommes pas, comme nous l’avions déjà précisé, en train de fétichiser l’usine. La production ne se situe pas que dans les usines. Cependant, l’« anti-capitalisme » n’est pas une idée que les gens peuvent prendre en passant, mais une tendance, un mouvement surgissant de nos conditions sociales (la première d’entre elles est notre rapport au travail) qui vise à détruire le capital dans son ensemble. Quelle que soit l’importance du capital financier ou du FMI, une attaque partielle contre le capital ne peut avoir que des résultats partiels. Et les « révolutions » à moitié faites ne font que creuser leur propre tombe.
En échouant à identifier des situations « séduisantes et inspirées » à l’extérieur des siennes propres, le mouvement de l’action directe se tient aux marges des antagonismes sociaux. La plupart de ses préoccupations n’émergent pas de conditions sociales immédiates mais sont dans de nombreux cas le résultat de considérations essentiellement morales qui accompagnent un mode de vie spécifique. Nous assistons ainsi au spectacle bizarre d’activistes de l’action directe en train de choisir à quelles luttes prendre part, un reste du background de l’action directe conçue comme un supermarché des problèmes partiels. Le refus qu’ont certains à prendre part à des luttes dont le dénominateur commun minimal n’est pas d’être « séduisantes et inspirées », montre simplement qu’ils vivent en fait dans une « zone de confort politique » (au moins dans leurs têtes) au sein de laquelle nous aurions le luxe de décider quelle partie de la totalité nous allons attaquer, si possible une différente chaque jour.
Ce qui n’était d’habitude qu’un danger potentiel avec la création d’une classe séparée « de révolutionnaires », avec une position de spécialistes dans les luttes subversives, est maintenant devenu une réalité dans le mouvement de l’action directe. Le rôle de militant est devenu le spectacle dominant dans le mouvement de l’action directe, ce dont ce dernier est conscient. Le rôle de militant a été correctement discrédité ailleurs 7, ce n’est donc pas la peine d’y revenir. Il est toutefois intéressant de remarquer le développement d’un fétichisme bizarre de la violence dans la partie radicale du milieu de l’action directe. Même s’il est important d’attaquer les éléments pacifistes et d’exposer leur réformisme 8, il s’est produit une glorification d’une violence qui semble détachée de la réalité sociale qui l’a produite. « La conception matérialiste de la violence exclut toute position de principe, aussi bien en faveur de ces méthodes que contre elles. Cette conception ne signifie pas qu’il faille en revenir aux principes de la société bourgeoise plutôt que de transformer la violence en un bien absolu, car elle ne la condamne pas non plus comme un mal absolu » (Barrot).
Plus le capital essaie d’étendre sa domination sur nos vies, plus notre besoin de communauté s’intensifie. Cela se reflète dans chaque lutte contre le capital, qui est — c’est le plus important — notre tentative de se connecter avec d’autres personnes et de transcender l’isolement qui nous est imposé. A présent, le danger de créer une pseudo-communauté est évident. En accord avec l’adoption non-critique du rôle de militant, le mouvement de l’action directe a tenté de lutter contre l’isolement en créant une pseudo-communauté d’activistes, séparée du reste des « gens normaux », celle qui possède une conscience révolutionnaire claire que les gens attendent simplement de recevoir. Comme une famille bourgeoise mesquine, le mouvement de l’action directe se voit comme le centre du monde et se pense en tant que communauté, recherchant à se créer comme telle à chaque occasion. Cette communauté illusoire est fortement soutenue par des « sessions » permanentes d’auto-assurance, au cours desquelles la suprématie du milieu de l’action directe est adroitement démontrée. C’est généralement fait en comparaison avec les « gauchistes ennuyeux », auxquels le mouvement de l’action directe s’oppose en tant que militants éclairés.
Il est évident que les gauchistes sont ennuyeux et que leurs idées sur l’action ne sont ni imaginatives ni inspirées, mais ce n’est pas vraiment le problème. Cette opposition échoue à les montrer pour ce qu’ils sont réellement, c’est-à-dire des organisations capitalistes. A la place, la critique bien-intentionnée s’égare et se termine en suggérant que le principal problème des gauchistes est leur manque d’imagination ! Il devient évident que cette « critique » des organisations gauchistes a pour objectif plus direct de rassurer les activistes de l’action directe comme les seuls révolutionnaires plutôt que de présenter la fonction contre-révolutionnaire des gauchistes. Il est surprenant de voir combien les anarchistes considèrent comme une part intégrale de leur identité d’attaquer en permanence les trotskystes, ce qui pourrait être fait simplement en pointant la structure hiérarchique de leur parti, ceci accompagné par la nécessaire dénonciation de toute autorité. Pourtant, même cette critique serait utile, si seulement ils l’adressaient contre le mouvement de l’action directe lui-même, dont la structure, bien que plus fluide, contient aussi des tendances à la hiérarchie.
De façon similaire à la conception léniniste du parti d’avant-garde qu’il méprise tant, le milieu de l’action directe partage nombre de ses caractéristiques. L’idée que les « gens normaux » ont seulement besoin d’être en contact avec leurs idées pour devenir révolutionnaires, le ton pédagogue de leurs apparitions publiques (du « festival d’idées anarchistes » au « un journal détourné qui explique l’anarchie »), l’idée générale que la révolution viendra lorsque les « gens normaux » seront réunis et influencés par la « conscience révolutionnaire » dont le milieu de l’action directe est rempli. En même temps, les partis gauchistes se font cracher dessus à chaque occasion à cause de leur « avant-gardisme ».
En termes d’organisation, malgré la proclamation que le milieu de l’action directe est structuré de façon « autonome » et non-hiérarchique, la convention implicite est que des événements comme le 18 juin à Londres ou Seattle n’auraient jamais pu arriver s’ils n’avaient pas été proprement organisés. Sans même prendre en compte la rhétorique anti-hiérarchique, ce fait prouve encore une fois la séparation entre « les activistes professionnels » et les « gens normaux ». De cette manière, le Réseau d’action directe « non-hiérarchique » à l’origine des événements de Seattle fut capable d’imposer une série de règlements et des manuels à ceux qui souhaitaient prendre part aux actions « anti-capitalistes » préparées contre la conférence de l’OMC — contre laquelle la plupart des objections concernaient le contenu de ses principes sans remettre en cause la notion de principes en soi — ; pendant ce temps, les anarchistes « anti-autoritaires » à l’origine des préparations du 1er mai ont adopté des « principes » similaires et des règlements afin d’exclure les trotskystes hiérarchiques 10. L’illusion que la hiérarchie peut être abolie avec l’adoption de principes « anti-hiérarchiques » montre qu’ils ont (tout comme le mouvement de l’action directe) une conception idéologique de la hiérarchie, en refusant de la voir comme un problème à dépasser par le développement de notre lutte.
Une partie de l’idéologie « anti-mondialisation » du mouvement de l’action directe est la focalisation sur ses conséquences sur pays « sous-développés », focalisation dont l’un des effets est un soutien dénué de critique aux mouvements de libération dans le tiers-monde, une pratique réminiscente du babillage léniniste. La lutte des Zapatistes au Mexique, des paysans sans-terre au Brésil, des guérillas maoïstes au Tibet, etc ont toutes reçues un soutien enthousiaste et sans critique, justifié par l’argument qu’à « nous », en tant qu’occidentaux qui vivons dans une « zone de confort politique », il nous était impossible de critiquer la lutte de gens dont les expériences et la lutte sont ce qu’elles sont, si loin de notre « zone » d’où on ne peut « comprendre ». Mais en fait, ces luttes ne nous touchent que dans la mesure où nous pouvons apprendre d’elles et les relier à nos propres luttes. En cherchant un dénominateur commun minimum entre les différentes luttes dans diverses parties du monde, le milieu de l’action directe ignore le contenu de ces mouvements, et tente de créer le spectacle de l’unité. Le fait, par exemple, que les Zapatistes parlent d’unité nationale ou de société civile, ou que les guérillas maoïstes sont (simplement) maoïstes est évidement irrecevable pour les militants de l’action directe. A la place, ils se focalisent sur les éléments spectaculaires de ces luttes (des gens en passe-montagnes et des pistolets assortis à la dernière mode guérillero). Toute critique radicale de leur contenu leur est superflu.
La séparation entre pays développés et sous-développés, entre des « zones de confort politique » et des luttes de libération nationale du tiers-monde immunisées de toute critique radicale grâce à leur spectacle « révolutionnaire », est de loin le plus gros paquet de conneries qui sort du milieu de l’action directe. Bizarrement, il y a vingt ans, les révolutionnaires n’auraient pas eu la moindre hésitation à discréditer n’importe quelles conneries comme étant léninistes. Aujourd’hui, tout se justifie si c’est adapté au récipient : sexy, inspiré ou exotique.
Au milieu de l’enthousiasme ou de la grandeur, le mouvement de l’action directe voit un mouvement anti-capitaliste croissant partout. Cette illusion les empêche de reconnaître que, dans sa forme actuelle, le mouvement de l’action directe ne va nulle part.
Undercurrent
Brighton and Hove Unemployed Worker’s Centre
4 Crestway parade — Hollingdean — Brighton — BN1 7BL — Royaume-Uni
(1) Il semble que la « bataille » de Seattle ait été majoritairement caractérisée par une extrême brutalité policière et par des pacifistes protégeant violemment (!) la propriété, plutôt que par la destruction de la propriété et des attaques contre les flics. C’est difficilement ce qu’on pourrait appeler une « bataille ».
(2) Comme en jardinant dans un cimetière : il y a quelques fleurs, mais elles sont plantées dans la mort et la pourriture.
(3) On peut trouver une analyse/critique plus générale sur le mouvement anti-routes dans Aufheben n°3, 1994, « Can We Slay the Roads Monster ? ».
(4) Les évolutions récentes dans le milieu de l’action directe montrent un oubli de ses aspects les plus importants : plutôt que d’aller vers une tentative intelligente de comprendre et de poursuivre à partir du J18 et de Euston (N30), la tendance est au retour à l’agenda écologiste (la guérilla jardinière) et aux conférences anarchistes.
(5) On en trouvera un exemple parfait dans Do or Die n°8, « War is the health of the State : An Open Letter to the Direct Action Movement ».
(6) Beaucoup d’activistes, par exemple, refusent de prendre part aux luttes contre les diminutions des allocations pour les chômeurs, bien qu’ils soient pour beaucoup au chômage eux-mêmes. Ces luttes ne sont d’évidence pas aussi « séduisantes et inspirées » que d’occuper les bureaux de Shell pour un après-midi ou de se déguiser en tortue à travers les rues de Seattle.
(7) L’internationale situationniste a produit une critique très précise de cette tendance contre-révolutionnaire. Pour des attaques plus récentes contre le rôle du militant, voir la critique utile, bien qu’un peu hésitante, dans Reflections on June 18th, « Give up activism » [« Abandonnez l’activisme »].
(8) Bien que parler du « pacifisme comme pathologie » manque vraiment l’objectif (voir Do or Die n°8, article « Pacifism as Pathology »). En fait, les remèdes proposés contre cela sont tout aussi « pathologiques » que la « maladie » à « guérir ».
(9) Le problème n’est pas la nature « anti-démocratique » du Réseau d’action directe. Si la majorité des personnes suivent des règlements, cela signifie qu’il y avait tout de même un accord avec leur contenu. Dire que ce sont ces « règlements et guides » qui ont empêché les gens d’utiliser la violence est évidement faux.
(10) Il a été à la fois extrêmement triste et drôle de voir de quelle manière 50-60 anarchistes ont passé une heure de leur mini-conférence pour exclure un membre du Parti (trotskyste) des travailleurs, une mesure qui fut justifiée ensuite par l’argument que «on ne veut pas se faire tirer dessus comme des perdrix ». Evidement, pour les anarchistes, c’était une éventualité certaine lors du 1er Mai...
[Ce texte, traduit de l’anglais par C.C. pour cette brochure, est paru dans Undercurrent n°8, avril/mai 2000, http://www.snpc.co.uk/undercurrent/]
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