Tout d’abord publié dans le magazine Radical Philosophy ( https://www.radicalphilosophy.com/commentary/haitian-inspiration ) ce court essai de Peter Hallward explore le pouvoir ainsi que la signification de la révolution haïtienne pour nous maintenant.
Il y a 200 ans ce mois-ci (article publié en janvier 2004) la colonie française de saint-Domingue, dans l’archipel de Hispaniola, était devenue la nation indépendante de Haïti. Certains changements ont requis des sacrifices et ont amené plus d’espoir. Certaines voix ont été complètement oubliées par ceulles qui voulaient nous faire croire que l’histoire s’est débarrassée de cela, y mettant fin volontairement en éclipsant le socialisme, la libération nationale, les indépendances significatives dans le monde en développement.
Sur les trois grandes révolutions qui ont débuté dans les décennies finales du XVIIIe siècle –l’américaine, la française, l’haïtienne – il n’y a que la troisième qui a réellement appliqué le principe qui a l’été à l’origine de chacune d’elle : l’affirmation des droits inaliénables de l’humain. Il y n’a qu’en Haïti que la déclaration de la liberté de l’être humain a été universellement cohérente. Il y n’a qu’en Haïti que cette déclaration a été protégée à tout prix, en opposition à l’ordre social et à la logique économique de l’époque. Il n’y a qu’en Haïti que les conséquences de cette déclaration – abolition de l’esclavage, les missions, l’inégalité raciale – a été admise comme ayant des répercussions sur le monde entier. Et de ces trois révolutions, c’est celle d’Haïti qui représente le mieux les conséquences que les personnes cherchant à retrouver ses idéaux recherchent.
Reconnu comme étant un territoire français depuis la fin du XVIIe siècle jusqu’aux années 1780, Saint Domingue était la colonie la plus robuste dans le monde : c’était de là que venaient les pierres précieuses sur la couronne impériale française, c’était la base pour la croissance de la bourgeoisie et sa nouvelle prospérité. Paul Farmer écrit : « à la veille de la révolution américaine, Saint-Domingue – à peine la taille du Maryland – a généré plus de richesses que l’ensemble des 13 colonies nord-américaines confondues et à la veille de la révolution française, c’était devenu le plus grand producteur de café au monde, et le producteur d’environ 75 % de la production mondiale de sucre. Cette productivité exceptionnelle était le résultat d’une économie des plantations exceptionnellement cruelle, fondée sur le travail d’esclaves qui travaillaient jusqu’à leur mort, une expansion tellement rapide que même l’expansion rapide du commerce triangulaire dans ces mêmes années était incapable d’en rattraper le rythme. La mortalité était montée à un tel point durant les années 1780 que la colonie accueillit environ chaque année 40 000 nouve-lles-aux esclaves. En 1789, Eric Williams émettait la suggestion que cette « perle des Caraïbes » était devenue, pour la majorité de ses habitant-e-s « le pire enfer sur terre ».
Une croissance rapide avait mis une puissance significative sur la structure sociale de la colonie. Le pouvoir coercitif était divisé entre trois groupes antagonistes – d’abord l’élite des planteu-r-se-s blanc-he-s, puis les représentant-e-s du pouvoir français impérial sur l’île, enfin un pouvoir de plus en plus grand, bien que politiquement nul, détenu par les mulâtres, ancien-ne-s esclaves. Au début de la révolution française, des tensions entre ces trois catégories, qui détenaient le pouvoir dans la colonie ont éclaté, et quand une révolution des esclaves a commencé en août 1791, le régime a été incapable de lutter. Envoyé pour rétablir l’ordre, le commissaire français Sonthonax a rapidement été confronté à une rébellion des planteu-r-se-s blanc-he-s qui recherchaient une plus grande indépendance vis-à-vis de la France républicaine et un retrait des droits civiques récemment accordés aux mulâtres de l’île. Sonthonax s’était contenté de supprimer la rébellion en accordant la liberté aux armées d’esclaves qui contrôlaient toujours les campagnes, en échange de leur aide. Les années suivantes, l’armée d’esclaves émancipé-e-s, qui était menée par Toussaint-Louverture a peu à peu gagné le contrôle de l’île. Après une série de campagnes militaires brillantes, Toussaint-Louverture à gagné contre les planteu-se-r-s, l’Espagne et le Royaume-Uni ; ainsi que contre ses propres riva-les-ux parmi les personnes noires ou mulâtres. D’ici au siècle suivant, il était devenu le chef principal de l’île de Saint-Domingue. Ne voulant pas se détacher totalement de la France, Toussaint a permis qu’il soit lui-même fait prisonnier par les forces expéditionnaires envoyées par Napoléon Bonaparte en 1801 pour restaurer l’esclavage colonial. Les troupes de Napoléon avaient été pleines de succès en Guadeloupe mais avaient connu la défaite à Saint-Domingue. L’armée de Toussaint-Louverture, qui était rassemblé autour de Jean-Jacques Dessalines avait connu 50 000 pertes. Les dernie-ère-r-s françai-se-s à partir ont été expulsé-e-s en novembre 1803.
A part l’extraordinaire impact de cette séquence historique, pourquoi est-ce que toute personne qui a le moindre intérêt dans la philosophie radicale devrait avoir un intérêt pour l’indépendance haïtienne ? L’île d’Haïti est invariablement décrite comme étant « une des plus pauvres régions de l’hémisphère nord. » L’exemple est régulièrement pris pour montrer un échec de tentative de développement économique, une « modernisation » non-finie, dépourvue de tout bénéfice menant usuellement à une démocratie représentative, une société civile moderne, des investissements étrangers stables. Régulièrement, Haïti s’est montré comme le référent de ce qu’il ne faut pas faire (généralement, un référent raciste) quand on parle du vaudou ou du virus du sida ar exemple. Pourquoi montrer un intérêt pour la révolution qui a amené à la création d’un tel état ? Voilà quelques réponses évidentes.
1. Si la révolution française demeure comme étant le grand événement politique des temps modernes, la révolution haïtienne doit figurer comme étant le seul événement significatif de cela. Les colonies françaises étaient le seul endroit où les principes « universels » de liberté et d’égalité, affirmés en 1789, ont été réellement testés. Il s’agissait de cet endroit extraordinaire où ces principes ne pouvaient manquer à réussir. Aucune question ne servait à clarifier les différences politiques d’avec les assemblées révolutionnaires aussi efficacement que la question coloniale, et, comme Florence Gauthier l’a montré, aucune question n’a eu un rôle plus important dans la transition d’une prescription Jacobine des droits naturels de l’affirmation thermidorienne des droits sociaux – les ordonnances, la propriété et la prospérité. La révolution haïtienne a continué, encore plus, là où la révolution française avait laissé tomber, avant que Napoléon Bonaparte essaie de rétablir l’esclavage dans la partie occidentale d’Hispaniola. Toussaint-Louverture l’avis aboli dans la moitié orientale. Autant que notre présent politique demeure thermidorien, la logique utilisée par le lobby colonialiste français afin de justifier la préservation de l’esclavage nous dit quelque chose à propos des questions que nous nous posons sur la logique qui existe toujours au sujet de la division du travail aujourd’hui. Pierre Victor Malouet, parlant pour les planteu-se-r-s à l’assemblée en 1791, savait que la déclaration universelle des droits de l’homme était incompatible avec l’existence des colonies. Ainsi, il a appelé les autres membres patriotes à préserver le statut exceptionnel de leurs colonnies. « Cela n’est pas une question de savoir si l’institution de l’esclavage peut être défendue en tant que principe, » dit Malouet : « aucun homme avec un sens de la morale ne va proférer une telle doctrine. La question, plutôt, c’est de savoir si nous pouvons, dans nos colonies, changer cette institution sans une accumulation des crimes de l’ennemi. » Ce principe basique persiste aujourd’hui. Les règles qui s’appliquent « aux autres » ne peuvent raisonnablement pas être appliquées à « eulles » sans compromettre la stabilité de nos investissements, sans risquer une récession globale, encore pire la terreur.
2. Ce que l’indépendance haïtienne a effectué, cela nous rappelle que les politiques doivent toujours appliquer comme « l’art du possible ». La révolution haïtienne a mis fin à l’une des séquences les plus improbables dans l’histoire du monde. Les observat-rice-eur-s contemporain-ne-s ont été unilatéralement étonné-e-s. Comme il a été observé par Robin Blackburn, les forces de Toussaint-Louverture brisaient les chaînes de l’esclavage colonial dans « ce qui était, en 1789, son plus grand lien ». Iëls ont fait face à la forme de préjudice idéologique la plus dévastatrice qui n’est jamais été confrontée par un quelconque mouvement de résistance. Iëls ont des gagné contre les armées de la puissance impériale la plus forte de la planète. Leur exemple a, plus tard, probablement été une grande source d’inspiration pour les mouvements de libération Africains ou d’Amérique Latine : Haïti a promu un support de la plus grande importance (avec peu de reconnaissance) à Simon Bolivar dans sa lutte contre l’Espagne, et dans les premières décennies du XIXe siècle, il a aidé à motiver les rebellions contre l’esclavage à Cuba, en Jamaïque, au Brésil, aux USA, de la même manie que cela va aider, plus tard, les personnes travaillant à une fin du colonialisme en Afrique.
3. La révolution haïtienne est un exemple particulièrement dramatique de la façon dont la « nécessité historique » ne fait son apparition que de manière rétrospective. Les personnes restant à l’écart de l’action jusqu’à ce que l’importance stratégique du moment soit visible ne compte jamais agir. Avec du recul, il est évident que dans les circonstances de la fin du 18ème siècle, seule l’indépendance de Haïti pouvait apporter également la fin effective de l’esclavage sur l’île. Ceci dit, il a fallu 10 années à Dessalines pour arriver à cette conclusion, et visiblement, c’est une conclusion que Toussaint-Louverture ne voulait pas accepter. La volonté finale de Toussaint de calmer les Français-ses afin de préserver la structure (essentielle) de l’économie des plantations, pour faire avec les planteu-se-rs blanc-he-s lui a coûté la majorité de son soutien populaire dans sa campagne finale contre la France : l’homme qui avait fait le plus pour la libération des esclaves ne pouvait rien faire pour conserver cet exploit. De manière similaire, même si le soulèvement des esclaves, qui a illuminé toute la séquence, a été planifié avec attention et a été totalement préparé par les conditions structurelles de l’économie des plantations elle-même, ces conditions complètes sont restées obscures même longtemps après les événements. Pas un-e seul-e des meneu-se-r-s impliqué-e-s dans le soulèvement n’avait l’abolition de l’esclavage dans sa pensée. Cette abolition leur a virtuellement été imposée par le refus des planteu-r-se-s d’accepter quoi que ce soit d’autre que le fait que leur armée se rende unilatéralement. Leur décision d’abolir l’esclavage a alors été une décision qui a été forcée à Sonthonax, comme résultat des divisions indubitables existant dans les élites de Saint-Domingue.
4. Bien que le procédé aille de lui-même et bien qu’il soit imprévisible, la réussite de la liberté du peuple haïtien et son indépendance devaient l’obligatoirement se faire avec l’aide de l’action directe, sans médiation de « reconnaissance », sans « négociation », sans « communication ». Pendant le XVIIIe siècle, il n’était pas courant d’avoir des arguments contre l’esclavage. Montesquieu avait une certaine idée des « justifications » au sujet de la race et de la religion. L’encyclopédie disait que le commerce triangulaire était un crime contre l’humanité. Jean-Jacques Rousseau identifiait l’esclavage avec un déni d’humanité pur et simple. La société principalement girondine des Amis des Noirs supportait une « liberté prudemment préparée pour les esclaves » à l’intérieur d’un système colonial réformé. Il existe un monde de différence, cela dit entre l’assertion de tels principes et une solidarité active avec un soulèvement des esclaves. Brissot, le créateur de cette société a appelé à la répression du soulèvement des esclaves aussitôt qu’il a débuté. Comme le montre CLR James, une morale fervente au service d’une exploitation diabolique « ne peut avoir aucun poids, ni maintenant ni jamais » car les personnes au pouvoir ont la faculté de résister à de très grandes pressions. Les personnes modérées qui ont travaillé à l’amélioration des conditions existantes à Saint-Domingue à travers la législation officielle n’ont virtuellement rien réussi en trois années de bla-bla-bla non-productif et l’acceptation finale par les Jacobins de la fin de l’esclavage est arrivée 2,5 années après la révolte de 1791. À la différence d’esclaves, qui n’avaient aucune représentation officielle, les mulâtres de l’île étaient affaibli-e-s autant par leurs efforts constants pour être reconnu-e-s par la France que par leur détermination téméraire à poursuivre leur demande d’isolation, sans support par les personnes noires. Pour ce qui est connu de l’aversion bien connue de Tocqueville pour l’esclavage, il devait se faire l’écho du lobby colonialiste, presque à la lettre, quand dans les années 1830 et 1840, il en est venu à défendre « la domination totale » de l’Algérie à travers « la destruction du pays et les formes ressemblants à l’apartheid du contrôle social »). Parmi les philosophes françai-se-s, il n’y a que Diderot et Raynal, puis Mercier, qui voulaient bien dire aux nations d’Europe dans des mots qui ont pu inspirer Toussaint-Louverture lui-même que « nos esclaves n’ont pas besoin de votre générosité ni de vos conseils, s’iëls veulent briser le joug sacrilège qui les oppresse… Seul un chef courageux est demandé, [qui] viendra en avant, et tiendra le bâton sacré de la liberté. »
5. La révolution haïtienne est une illustration puissante de la manière par laquelle chaque prescription activement universelle est une revalorisation à la fois exceptionnelle et divisive d’une action qui jusqu’ici était un aspect non-représentable ou « intouchable » de la situation. Chaque principe réellement universel, comme Alain Badiou le suggère, « apparaît tout d’abord comme la décision de quelque chose qui ne peut pas être décidé, ou la valorisation de quelque chose sans valeur » et est une application consécutive à cela, cela assurera que le groupe ou sa capacité, qui jusqu’à maintenant a été « présente de manière minimale » dans cette situation, arrive finalement à acquérir une intensité maximale. Juste avant 1791, ce qui était accepté virtuellement par tou-te-s les participant-e-s au débat à propos de l’esclavage, y compris les futurs meneu-se-rs esclaves, était l’impossibilité d’une nation peuplée d’être-sse-s libres de descendance africaine. Ce qui a été accompli par cette indépendance, cela doit être compris comme étant l’un des plus grands pas contre le racisme jamais exercé. Il avait été très rare que la race soit comprise comme ce qu’elle était – en aucun cas une source de conflit ou de différents, mais plutôt une signification vide, rattachée à une économie de pillage et d’exploitation. Tôt les aut-rice-eur-s haïtien-ne-s ont parfaitement compris-es le point récemment fait par Wallerstein et Ballibar (parmi d’autres) que les théories sur les inégalités raciales étaient fabriquées par des colons blanc-he-s, dans le but de légitimer l’esclavage et la poursuite des intérêts européens. La première constitution de Haïti (1805) était arrivée brusquement, avec toute la question de la race, identifiant les personnes haïtiennes, sans prendre en compte la couleur de leur peau, comme étant des personnes noires – caractérisation qui incluait, entres autres, un bon nombre de membre-sse-s des armées allemande ou polonaise qui étaient arrivées afin de combattre Napoléon. David Nicholls démontre que, au cours du XIXe siècle, bien que peu d’intérêt soit montré pour l’état des cultures africaines, « les aut-rice-eur-s haïtien-ne-s, mulâtres comme noir-e-s, conservati-f-ve-s marxiste, étaient plutôt unanimes sur le fait de montrer Haïti comme étant un symbole de la régénération africaine et de l’égalité raciale. Les Intellectuel-le-s mulâtre-sse-s de l’élite, qui, en apparence, auraient tout à fait pu être pris-e-s pour des Européen-ne-s, se voyaient avec fierté comme étant Africain-e-s, membre-se-s de la race noire » Et, comme c’est montré par Nicholls, rien n’a entamé plus l’indépendance haïtienne dans la période post-révolutionnaire que la résurgence du préjudice sur la couleur de la peau et la re-différenciation des personnes haïtiennes en termes du fait de s’iëls avaient une certaine couleur de peau ou s’iëls étaient noir-e-s.
6. La révolution haïtienne sert à nous rappeler qu’une telle division ne peut être affrontée que par une révolution. L’indépendance de Haïti a été la conclusion du seul soulèvement par des esclaves qui ai eu lieu. Il n’est pas difficile de faire la liste des raisons conjecturelles de ce succès, ce qui inclurait également le grand nombre et la grande concentration d’esclaves dans la colonie, l’économie et les facteurs culturels qui les ont amenés à se rapprocher les un-e-s des autres. La majeure part a été traité-e d’une liberté de mouvements relative qui était appréciée par l’élite « managériale » des esclaves, l’intensité des divisions économiques et politiques dans la classe dirigeante, les rivalités au sein des pouvoirs impérialistes, l’inspiration amenée par les révolutions française et états-unienne, la qualité de meneur de Toussaint-Louverture, etc. Par-dessus tout, des comptes rendus sont arrivés à propos de ce qui était l’une des premières instances de guerre totale moderne : la détermination des gen-te-s à résister à un retour à l’esclavage, sous n’importe quelles circonstances. C’est la grande constante de toute la période révolutionnaire, et c’est cela qui mène vers la direction générale, autrement alambiquée, des manœuvres tactiques des meneu-r-se-s. Comme Carolyn Fick en a fait état quand Dessalines, Christophe et d’autre généraux noir-e-s, finalement, ont fait sécession avec les Français-e-s en 1802, ça a été la constance de leur armée qui a rendu possible leur décision finale : « Depuis le début, les masses ont résisté à la France, et cela depuis le début malgré le fait (et non de ce fait) qu’iëls détenaient le pouvoir. Tout ce poids était sur leurs épaules et iëls avaient payé le prix fort pour leur résistance continue. C’était également eulles qui, maintenant, avaient rendu possible la réintégration politique et militaire des leadereuses dans la lutte collective. « Ainsi, les révolutionnaires de Haïti refusent la logique existante maintenant sur ‘l’intervention démocratique’. La récente introduction de la démocratie en Irak n’est que la dernière d’une longue séquence de tentatives internationales à imposer des arrangements politiques intéressés pour un peuple dont le processus de participation n’est tolérable que si cela reste complètement passif et obéissant. Le peuple haïtien, par contraste, a été déterminé à demeurer le sujet plutôt que l’objet de leur propre libération. En faisant cela, iëls ont également défié cette passivitéabsolue. Ce qui « restait » de quasi humain a refait surface dans un certain en sens, dans le livre récent par Giorgio Agamben sur une vie chiche et les Muselmänner. Alors que « avant la révolution, beaucoup d’esclaves devaient être fouetté-e-s avant de bouger de là où iël était assis-e. » James que, a pour la révolution, ces même ‘sous-hommes’ allaient alors combattre dans ce qui allait être l’une des plus grandes batailles révolutionnaires de l’histoire.
7. En opposition totale maintenant, le consensus démocratique aujourd’hui, l’histoire haïtienne depuis Toussaint-Louverture et Dessalines jusqu’à Préval et Aristide montre la grande articulation entre la mobilisation politique populaire et des qualités de dirigean-te autoritaire. Cela va sans le dire, la fortune des premi-er-ère-s a régulièrement souffert des excès de ces derni-ère-er-s. Cela n’est pas moins évident, cela dit, que les arguments en faveur d’une ‘réforme démocratique’ ainsi que d’une ‘séparation des pouvoirs’ qui serait judicieuses, ont largement été faites par les élites haïtiennes, avec l’aide de leurs sponsors internationaux. Précisément, ce genre d’argument a servi à paralyser la présidence par Aristide, à partir du moment où il est entré en fonction pour la première fois. Le motif usuel était déjà et par la réaction à la propre réglementation établie par Dessalines pendant les quelques années en tant qu’empereur (indéniablement assoiffé de sang et autoritaire). Dessalines avait introduit des taxes sur la marchandisation qui étaient peu populaires au sein de l’élite. Il avait alors pris des dispositions pour annuler tout préjudice entre les blanc-he-s et les personnes de couleur. Il avait alors commencé à bouger vers une distribution plus équitable des terres. Il avait annoncé que « Nègres et mulâtres, nous avons combattu contre les blanc-he-s, les propriétés que nous avons conquises en versant notre propre sang, elles nous appartiennent. Je m’attends à ce qu’elles soient divisées de manière équitable. » Peu après, en octobre 1806, l’élite des mulâtres a fait assassiner Dessalines, et a conséquemment fait bien attention à protéger leurs privilèges commerciaux, en imposant des limites strictes à un pouvoir présidentiel. Le successeur de Dessalines, comme cela est sous-entendu par James, est Fidel Castro. D’un autre côté, des tentatives répétées (ce qui avait été commencé par Toussaint-Louverture lui-même) pour restaurer l’économie des vieilles plantations par des biais autoritaires, en se basant sur les esclaves émancipé-e-s n’a jamais amené à retour vers leur vie précédente. Le but principal de la majorité des participant-e-s pendant la guerre d’indépendance, était le contrôle direct de leur propre mode de vie et de leurs terres. La première constitution haïtienne a clairement bloqué l’appropriation par des personnes étrangères des terres haïtiennes. D’ici aux années 1820, beaucoup d’ancien-ne-s esclaves haïtien-ne-s étaient devenu-e-s propriétaires de terres paysannes. L’effort continu pour garder, au minimum, un certain degré d’économie autonome est l’un des facteurs qui aident à expliquer les politiques exceptionnellement agressives d’économie qui ont, consécutivement, été imposées sur l’île, tout d’abord par l’occupation états-unienne (1915-1934) puis par les ajustements structurels boursiers demandés par le FMI qui, ensuite, a continué son occupation par d’autres moyens.
La majorité du pouvoir que James célébrait dans son compte rendu de la révolution haïtienne prend son origine dans le fait que cela est tourné vers ce qui, pour lui, représente les luttes à venir pour la libération africaine, pour un socialisme global. Aujourd’hui, les choses pourraient sembler ne pas être aussi claires. Les variantes sur l’esclavage, de nos jours, ne sont pas aussi nettes qu’elles l’étaient en 1788, et les justifications qui l’accompagnent vont habituellement inclure des arguments plus subtils que des références à la couleur de peau de quelqu’un-e. Cela dit, certaines choses n’ont pas changé. La révolution haïtienne a agi en totale opposition avec le grand pouvoir colonial de l’époque et, quand après thermidor, même la France révolutionnaire est retournée vers une logique colonialiste, seule l’île d’Haïti a continué la lutte afin d’affirmer les droits humains universels contre les impératifs de prédateur de la propriété. Aux yeux de ‘la communauté internationale’, le plus grand crime de Aristide était certainement d’avoir continué cette lutte. Les thermidorien-ne-s de tous les âges ont essayé de présenter une image pacifiste et en ordre des changements, comme consolation pour la propriété, la prospérité, la sécurité. La révolution haïtienne témoigne d’une autre conception du pouvoir dans l’histoire, de la possibilité d’un futur politique qui soit différent.
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