lundi, 9 mai 2005
Le besoin de communisme traverse la société du capital de part en part. Le mérite de l’ Appel est d’en prendre acte, et de vouloir ébaucher des stratégies qui soient à la mesure de ce constat. Sa faiblesse tient à cette tentation toujours renouvelée de croire que le désir d’établir des rapports différents suffit pour commencer à les produire.
Primo
L’Appel, comme son nom l’indique, n’est pas un texte d’analyse ou de débat : son propos n’est pas de convaincre ou de dénoncer, il est d’affirmer, de dévoiler, de révéler, et à partir de là d’énoncer une stratégie pour la révolution. Faut-il pour autant considérer, comme Gilles Dauvé, qu’un « appel ne se réfute pas, qu’on l’entend ou qu’on n’en tient aucun compte [1] » ?
L’Appel lui-même, par son refus de discuter des « évidences sensibles », encourage cette réaction dès les premières lignes de la première scolie : « Ceci est un appel. C’est-à-dire qu’il s’adresse à ceux qui l’entendent. Nous ne prendrons pas la peine de démontrer, d’argumenter, de convaincre. Nous irons à l’évidence » (proposition I, p.4) [2]. Mais, en même temps, l’Appel est le produit typique d’un débat inhérent à l’existence même de ce que j’ai appelé « l’aire qui pose la question de la communisation » : et ce même débat mené à son terme est un préalable à toute émergence d’un « mouvement communisateur » conscient de lui-même au sein de cette aire [3].
On aura compris que l’objectif de ces réflexions n’est pas de faire un commentaire de texte de l’Appel, d’être exhaustif sur ce sujet ou d’interpréter de manière académique la pensée ou la volonté de ses auteurs. Même s’il en est une des expressions, l’Appel est loin de faire l’unanimité dans les luttes qui, sous une forme ou une autre, posent la question de la communisation : il a au contraire été l’occasion de nombreuses discussions. Comme l’Appel illustre assez bien le penchant dans lequel peut tomber, de par sa problématique même, toute « l’aire qui pose la question de la communisation », mettre par écrit ces critiques est une occasion pour alimenter ce débat.
Secundo
Ce qui caractérise le courant communisateur, ce n’est pas tant une interprétation semblable du communisme qu’une attention portée au processus de sa production, ce que justement on appelle la communisation. L’Appel se situe explicitement dans cette perspective : « Tel que nous l’appréhendons, le processus d’instauration du communisme ne peut prendre la forme que d’un ensemble d’actes de communisation (...) L’insurrection elle-même n’est qu’un accélérateur, un moment décisif dans ce processus. » (Proposition VI, p.63). Mais, à la différence de Meeting dont la problématique est de questionner le concept de communisation, l’Appel tranche et donne à la communisation un contenu déterminé.
Dans l’Appel, le terme de communisation est systématiquement compris comme la « mise en commun ». Dans la citation précédente, par exemple, les « actes de communisation » dont il est question sont décrits ainsi : « mise en commun de tel ou tel espace, tel ou tel engin, tel ou tel savoir ». Ce qui est mis en commun, c’est l’usage, comme quand il est dit que communiser un lieu c’est en libérer l’usage. Ce sens est encore plus visible dans d’autres parties du texte. Par exemple : « En Europe, l’intégration des formes d’organisation ouvrières à l’appareil de gestion étatique - fondement de la social-démocratie - fut payée du renoncement à assumer la moindre capacité de nuisance. Ici aussi, l’émergence du mouvement ouvrier relevait de solidarités matérielles, d’un urgent besoin de communisme. Les « maisons du peuple » furent les derniers refuges de cette indistinction entre nécessités de communisation immédiate et nécessités stratégiques liées à la mise en oeuvre du processus révolutionnaire. » (Proposition V, pp 51 et 52). Même si la communisation est bien conçue comme communisation des rapports, c’est d’abord sur la base d’un usage commun : « Communiser un lieu veut dire : en libérer l’usage et, sur la base de cette libération, expérimenter des rapports affinés, intensifiés, complexifiés. » (Proposition VI, p.66).
Dans la même logique, si la communisation c’est la « mise en commun », le communisme est systématiquement assimilé au « partage ». Le thème du partage est omniprésent dans l’Appel. On le trouve développé particulièrement à partir de la proposition V dans les termes suivants : « Le plus singulier en nous appelle un partage. Or nous constatons ceci : non seulement ce que nous avons à partager n’est à l’évidence pas compatible avec l’ordre dominant, mais celui-ci s’acharne à pourchasser toute forme de partage dont il n’édicte pas les règles. » (proposition V, p.48). Le partage est la base de l’action collective telle que la voit l’Appel ; « Nous disons que squatter n’aura à nouveau un sens pour nous qu’à condition de s’entendre sur les bases du partage dans lequel nous sommes engagés » (proposition V, p.50).
Tertio
Il ne s’agit pas de dire que « partage » et communisme n’ont rien à voir, mais on a du mal à comprendre comment ils pourraient être synonymes. Le partage existe dans le capitalisme : des institutions sociales aussi importantes que la famille fonctionnent sur le partage, et même dans les pays ou le capitalisme est le plus ancien et où la relation familiale se réduit à sa plus simple expression (la relation parents/enfants), le capital, même économiquement, ne survivrait pas sans cette forme de partage social.
L’Appel reconnaît, d’une manière détournée, que le partage est aussi constitutif de l’ordre capitaliste en affirmant : « L’ordre dominant (...) s’acharne à pourchasser toute forme de partage dont il n’édicte pas les règles » (Proposition V, p.48). Mais alors doit-on comprendre que tout partage dont « l’ordre dominant » n’aurait pas édicté les règles est un partage communiste ? On pourrait le penser lorsque le communisme est purement et simplement assimilé au partage, moins le contrôle : « La question du communisme est donc d’un côté de supprimer la police, et de l’autre d’élaborer entre ceux qui vivent ensemble des modes de partage, des usages. » (Proposition VI, p.62).
Mais en même temps, il est bien écrit « élaborer les modes de partage ». On trouve aussi, plus loin : « Il appartient à l’exigence communiste de nous expliquer à nous-mêmes, de formuler les principes de notre partage » (proposition VI, p.64). Donc, le partage communiste n’est pas donné, il est à élaborer. Mais comment ? Ici, le texte se mord la queue. Un certain mode de partage conduit au communisme, d’accord, mais lequel ? Réponse, en substance : celui qui conduit au communisme... Rien n’est dit d’autre, sur ce qui peut le différencier des partages admis dans le monde du capital , que le fait que ce partage là doit conduire à une redéfinition des rapports. « Le communisme, donc, part de l’expérience du partage. Et d’abord du partage de nos besoins. Le besoin n’est pas ce à quoi les dispositifs capitalistes nous ont accoutumés. Le besoin n’est jamais besoin de chose sans être dans le même temps besoin de monde. » (Proposition VI, p.62). Se multiplient dès lors les définitions possibles du communisme : « Par communisme, nous entendons une certaine discipline de l’attention. » Ou encore : « La question communiste porte sur l’élaboration de notre rapport au monde, aux êtres, à nous-mêmes. » (Proposition VI, p.61 )
Parmi toutes ces conceptions du communisme, il en est toutefois une qui brille par son absence : le communisme comme suppression de la société de classes. Certes, l’Appel affirme que : « le communisme ne consiste pas dans l’élaboration de nouveaux rapports de production, mais bien dans l’abolition de ceux-ci. » (Proposition VI, p.65) Toutefois, il n’est nullement question de « l’abolition des rapports de classes », pourtant corollaire classique de « l’abolition des rapports de production ».
Jamais les termes de lutte de classe ou de prolétariat ne sont employés. Quant à l’adjectif « ouvrier », il ne sert qu’à qualifier le vieux « mouvement », quelque chose qui a un temps incarné l’aspiration au communisme mais qui n’est plus... L’Appel, cela dit, n’affirme pas que la division de la société en classes sociales antagonistes n’existe pas, ou a existé mais serait à présent aussi dépassée que l’usage de la vapeur dans les chemins de fer. Il n’en parle tout simplement pas.
Le capitalisme est certes présent dans le texte, mais loin d’être vu comme le système qui englobe la totalité de la réalité sociale, il est décrit essentiellement au travers de ses mécanismes de contrôle, au point qu’on peut aussi bien l’appeler « le capitalisme » que « l’empire » ou « la civilisation ». « Il y a un contexte général - le capitalisme, la civilisation, l’empire, comme on voudra -, un contexte général qui non seulement entend contrôler chaque situation mais, pire encore, cherche à faire qu’il n’y ait le plus souvent pas de situation. ON a aménagé les rues et les logements, le langage et les affects, et puis le tempo mondial qui entraîne tout cela, à ce seul effet » (Proposition I, p.9).
C’est bien parce que le capitalisme est considéré comme un dispositif et non comme un système que l’Appel suppose qu’il existe un « en-dehors » possible du monde du capital.
Quarto
Il faut revenir un instant sur la citation de la Proposition VI : « le communisme ne consiste pas dans l’élaboration de nouveaux rapports de production, mais bien dans l’abolition de ceux-ci. » La suite du texte contient une affirmation surprenante : ces « rapports de production », il serait possible de les abolir immédiatement « entre nous ». « Ne pas avoir avec notre milieu ou entre nous des rapports de production signifie ne jamais laisser la recherche du résultat prendre le pas sur l’attention au processus, ruiner entre nous toute forme de valorisation, veiller à ne pas disjoindre affection et coopération » (Proposition VI, p.65).
Le problème, c’est qu’un « rapport de production » n’est pas un rapport particulier entre deux personnes, ou même cent, ou même mille. C’est un rapport social généralisé qui ne peut pas s’abolir localement parce que, même là ou les gens ne « vivraient » pas, entre eux, des « rapports de production », ils n’en seraient pas moins pris dans les « rapports de production » qui structurent la société capitaliste tout entière.
Le « rapport de production » n’est pas un rapport entre individus, ou du moins il ne peut pas être que cela : deux personnes n’entretiennent pas entre elles un rapport de production privé, en quelque sorte, qu’il serait possible de nier par l’effet de sa seule volonté commune.
On dira peut-être que l’Appel non plus ne voit pas le rapport de production comme un rapport interindividuel, tout simplement parce que sa philosophie bannit le concept d’individu. Et, en effet, dans le texte de l’Appel, les « formes de vie » et autres « rapports au monde » traversent les corps . Mais les « rapports de production » ne sont pas davantage des rapports entre des « forme de vie ou entre des « mondes » que des rapports entre des personnes. Les ensembles qui sont liés par des « rapports de production » sont justement ceux que ces mêmes rapports définissent : c’est la position dans le rapport de production qui détermine l’ensemble, et non le contraire. Les rapports de production sont des rapports entre des classes.
Il est bien certain que la division de la société en classes serait infiniment plus visible si les rapports interindividuels étaient la traduction brute et sans recul des rapports de production. Le prolétaire soulèverait sa casquette en croisant le capitaliste à cigare et chapeau claque : et il n’y aurait rien d’autre à dire. Mais voilà, les choses sont un peu plus complexes, et le « libéralisme existentiel » n’est pas la traduction unique de l’effet des rapports de production dans la vie de tous les jours...
L’Appel n’a pas tort d’écrire que « le capitalisme aura consisté dans la réduction de tous les rapports, en dernière instance, à des rapports de production » (proposition VI p.65). Mais cette « réduction en dernière instance » n’est pas un télescopage. Il y a évidemment un lien, complexe, ténu, palpable pourtant, entre d’une part la sociabilité au bureau, la posture des corps dans les grandes métropoles, ou encore ce que l’Appel désigne sous le nom de « libéralisme existentiel », et d’autre part les « rapports de production » : mais c’est un lien, pas une identité.
Le « marxisme » écrirait que « les rapports de production déterminent les rapports que nous pouvons entretenir les uns avec les autres » : mais « déterminer » implique une nécessité de la forme même du lien, là où justement on observe une extrême diversité.
On pourrait aussi dire que « les rapports de production contiennent les rapports que nous pouvons entretenir les uns avec les autres ». Ils les modèlent et ils les bornent tout en ne les épuisant pas. Nous avons à la fois une marge de manœuvre certaine (c’est là-dessus que compte l’Appel) et une limite tout aussi certaine (c’est elle que l’Appel ne voit pas).
Quinto
N’importe quelle coopérative ouvrière peut abolir entre ses membres les « rapports de production » au sens où les entend l’Appel. S’est-elle affranchie pour autant de la valorisation capitaliste ? Les circuits financiers, la commercialisation, les standards de productivité, tout est là pour que les ouvriers de la coopérative s’auto-exploitent aussi sûrement que si le patron physique leur faisait toujours face. De même, une communauté dont les membres n’entretiendraient pas entre eux de rapports d’argent et travailleraient en commun serait-elle pour autant sortie des « rapports de production » ? À condition de transformer le communisme en une série de principes à respecter, peut-être pourrait-on en entretenir l’illusion quelque temps. Mais c’est oublier que chaque point de contact entre la communauté et son extérieur serait l’occasion de voir les « rapports de production » revendiquer leurs droits et réintroduire la communauté tout entière dans les rapports de classes : statut juridique de la terre et des bâtiments occupés, approvisionnements, énergie, vente de surplus.
Sexto
L’Appel est un texte alternatif parce que l’existence de communisme y est considérée comme possible dans un moment où le capitalisme règne encore.
Certes, il ne s’agit pas du communisme dans son état final, puisque celui-ci doit d’abord se constituer en force, tout en s’approfondissant, comme préalable à la révolution : et ce n’est qu’après l’insurrection, moment d’accélération du processus, que le communisme s’établit comme le rapport social universel.
Toutefois, le sens du texte est clair : même sous la forme de fragments, d’instants à explorer et à reproduire, de « grâce » à rechercher, il peut déjà y avoir des moments de communisme. Le tout n’est que de les reconnaître et, à partir de là, de s’organiser.
Septimo
Je ne suis pas d’accord avec Dauvé pour qui l’Appel serait exempt de toute trace d’alternative parce que « la communisation (y) est définie comme antagonique à ce monde, en conflit irréconciliable et violent (jusqu’à l’illégalité) avec lui. Elle diffère donc de l’alternative qui cherche (et souvent réussit) à se faire accepter à la marge, et à coexister durablement avec l’Etat et le salariat. » [4]
Le pacifisme n’entre pas dans la définition nécessaire de l’alternative : ceux que j’appellerai les « alternatifs confrontatifs » sont loin d’être marginaux dans ce type de mouvement. Pour prendre un exemple qui n’a rien à voir avec l’Appel, mais qui sera significatif parce qu’il est caricatural, on pourrait rappeler que dans le campement No Border de Strasbourg à l’été 2002, cette tendance était très largement présente. Ce camping, organisé contre le système d’information Shengen (SIS), a rassemblé entre mille et deux mille personnes et a été l’occasion à la fois d’un village éphémère « auto-organisé » vécu par certains comme une véritable Zone Autonome Temporaire (avec tout le folklore qu’on imagine) et d’une semaine d’actions tout azimut dans la ville de Strasbourg. Certes, les actions et manifestations n’étaient pas d’une extrême violence [5] mais, en tout cas, elles étaient toutes explicitement anti-légalistes et cherchaient à défier l’État sur son terrain. Il y avait sans doute des tensions entre une tendance plutôt « activiste » et une autre qui voulait avant tout défendre la merveilleuse expérience de ce camping autogéré, mais beaucoup de gens poursuivaient les deux objectifs en les voyant comme parfaitement complémentaires.
L’alternative consiste à croire que l’on peut, au sein du monde du capital, établir à un nombre restreint des rapports qui seraient déjà une préfiguration du communisme (quand bien même on n’utilise pas ce dernier terme, d’ailleurs). La position inverse tient que, tant que le capital comme rapport social n’est pas abattu, rien de ce qui peut ressembler au communisme ne peut être vécu.
Ceux qui se désignent souvent eux-mêmes comme alternatifs s’imaginent donc que, dans les campings comme No Border ou le Vaag [6] qui lui a succédé, dans les squats, ou je ne sais où encore, peuvent se vivre des moments qui se rapprochent d’une société libérée du capital, de l’argent, de la « domination », etc. et pensent que tout peut venir d’un effort des individus pour s’affranchir des « idées » mauvaises que la société leur a inculqué. Par exemple, cesser d’être sexiste ou patriarcal passe par une série de mesures touchant le comportement, le langage, etc.
Certains de ces alternatifs sont pacifistes. D’autres pensent que leurs désirs ne sont pas compatibles avec le maintien de la société du capital et sont parfaitement prêts à la lutte illégale et violente.
On en trouve aussi qui pensent que seule la lutte offre actuellement des possibilités de vivre des moments de communisme : l’ alternative est chez eux indissociable de l’activisme anticapitaliste. Ceux-là vont souvent récuser l’appellation d’alternatifs parce qu’ils craignent justement d’être assimilés au pacifisme. C’est dans cette dernière catégorie que pourrait se ranger l’Appel, qui écrit : « Aucune expérience du communisme, dans l’époque présente, ne peut survivre sans s’organiser, se lier à d’autres, se mettre en crise, livrer la guerre. » (Proposition VI, p.63).
À l’inverse, une position rigoureusement anti-alternative se trouve par exemple chez Théorie communiste, dont le concept d’ « auto-transformation des prolétaires » montre bien le hiatus qui peut exister entre ce qui peut se vivre dans la société du capital, et ce qui se vivra après le moment où le communisme aura été produit. Ce qui conduit les membres de TC et certains de ceux qui adhèrent à leurs thèses (comme François Danel, qui sur ce point est encore plus rigide que ses inspirateurs [7]) à voir dans chaque tentative pratique de poser la question communiste une démonstration du caractère inévitablement alternatif de toute démarche de ce type.
Il y a aussi la position que j’ai développée dans l’article de Meeting 1 (« Trois thèses sur la communisation »). Il s’agit de tenir compte de la critique essentielle adressée à l’alternative (pas de possibilité de développer le communisme au sein du monde du capital) : mais de reconnaître aussi qu’il y a forcément un rapport entre ce que sont les prolétaires actuellement et ce qui les rendra capables de produire le communisme un jour, autrement dit, qu’il est possible de se poser pratiquement des problématiques qui ont à voir avec le communisme quand bien même il est impossible de vivre actuellement quelque chose qui « tende vers » le communisme ou en soit une préfiguration. J’ai donc été amené à dire que le mouvement communisateur se caractérise par le fait qu’il se pose déjà dans les luttes des questions qui sont de même nature que celles qui mèneront à la production du communisme au moment de la révolution : mais que les réponses qu’il y amène, bricolées avec ce que le capital rend possible actuellement, ne sont pas elles-mêmes communistes.
Octavo
On trouve bien dans l’Appel une critique explicite de l’alternative : « C’est à force de voir l’ennemi comme un sujet qui nous fait face - au lieu de l’éprouver comme un rapport qui nous tient - que l’on s’enferme dans la lutte contre I’enfermement. Que l’on reproduit sous prétexte d’« alternative » le pire des rapports dominants. Que l’on se met à vendre la lutte contre la marchandise. Que naissent les autorités de la lutte anti-autoritaire, le féminisme à grosses couilles et les ratonnades antifascistes » (Proposition I, pp 7 et 8). Ou encore : « Et puis, il y a cette mystification : que, pris dans le cours d’un monde qui nous déplaît, il y aurait des propositions à faire, des alternatives à trouver. Que l’on pourrait, en d’autres termes, s’extraire de la situation qui nous est faite, pour en discuter de manière dépassionnée, entre gens raisonnables.
Or non, il n’y a pas d’espace hors situation. Il n’y a pas de dehors à la guerre civile mondiale. Nous sommes irrémédiablement là » (Proposition VII, p.72).
La deuxième critique, cependant, est davantage adressée à l’alternative pacifiste qu’à l’alternative tout court.
La question est donc de savoir pourquoi l’Appel, tout en posant une critique de l’alternative, penche malgré tout irrésistiblement vers celle-ci ?
La réponse se trouve peut-être à la proposition VI : « D’une manière générale, nous ne voyons pas comment autre chose qu’une force, qu’une réalité apte à survivre à la dislocation totale du capitalisme pourrait l’attaquer véritablement, c’est-à-dire jusqu’à cette dislocation justement » (Proposition VI, p.67). Toute la difficulté de la théorie révolutionnaire se tient cachée derrière cette phrase : il s’agit de comprendre le renversement du capitalisme comme un processus qui ne soit pas lui-même capitaliste, puisqu’au bout du compte il a la capacité de détruire le capitalisme, et qui pourtant prend naissance dans le rapport social capitaliste.
C’est en ce sens que l’Appel est représentatif du débat qui traverse l’aire qui pose la question de la communisation. Comme ses pratiques ne sont manifestement pas communistes, et ne peuvent pas l’être, cette aire a la tentation de voir dans sa moindre force ou sa moindre activité l’unique raison de l’inexistence des réponses aux questions communisatrices qu’elle met à jour.
Nono
On comprend aisément que le Parti dont parle l’Appel n’est en rien une avant-garde. En effet, alors que le parti léniniste prépare la révolution, et même plus précisément le coup d’Etat, le Parti dont il est question dans l’Appel produit directement le communisme, du moins le communisme de la période prérévolutionnaire. Bien plus : il est ce communisme.
« La pratique du communisme, telle que nous la vivons, nous l’appelons “Le Parti”. Lorsque nous parvenons à dépasser ensemble un obstacle ou que nous atteignons un niveau supérieur de partage, nous nous disons que nous “construisons le Parti” » (proposition VI, p.63). Le Parti n’est pas l’avant-garde, il est le camp tout entier. Il englobe même ceux qui ne se sont pas encore formellement rencontrés et liés : « Certainement que d’autres, que nous ne connaissons pas encore, construisent aussi le Parti, ailleurs. Cet appel leur est adressé » (proposition VI, p.63).
Les tics de langage les plus révélateurs de la tentation alternative qui s’impose progressivement dans l’Appel sont systématiquement associés à l’évocation du Parti : « À y regarder de près, le Parti pourrait n’être que cela : la constitution en force d’une sensibilité. Le déploiement d’un archipel de mondes. Que serait, sous l’empire, une force politique qui n’aurait pas ses fermes, ses écoles, ses armes, ses médecines, ses maisons collectives, ses tables de montage, ses imprimeries, ses camions bâchés et ses têtes de pont dans les métropoles ? Il nous paraît de plus en plus absurde que certains d’entre nous soient encore contraints de travailler pour le Capital - hors de diverses tâches d’infiltration, bien sûr » (Proposition VI, p.64). Mais croit-on vraiment que, si on n’est plus employé par telle entreprise ou tel gouvernement, on cesse de « travailler pour le Capital » ? Et qu’on a ainsi opéré une « sécession avec le processus de valorisation capitaliste » ? (Proposition I, p.10). Le propre de la subsomption réelle, c’est à dire de cette période dans laquelle le capital a d’une certaine manière absorbé la totalité de la réalité sociale au lieu de demeurer cantonné au processus productif, c’est bien que n’importe quelle activité est susceptible de devenir partie prenante du processus de valorisation.
Decimo
L’Appel aboutit, en termes stratégiques, à une impasse : le dernier paragraphe le reconnaît, qui conclut l’ouvrage sur un « pari », c’est à dire sur ce qui ne saurait s’argumenter : « ON nous dira : vous êtes pris dans une alternative qui, d’une manière ou d’une autre, vous condamne : soit vous parvenez à constituer une menace pour l’empire, et dans ce cas, vous serez rapidement éliminés ; soit vous ne parviendrez pas à constituer une telle menace, vous vous serez vous-mêmes détruits, une fois de plus.
Reste à faire le pari qu’il existe un autre terme, une mince ligne de crête suffisante pour que nous puissions y marcher, suffisante pour que tous ceux qui entendent puissent y marcher et y vivre » (proposition VII, pp 85 et 86).
La force matérielle en formation, le Parti, comment va-t-elle concrètement échapper à la répression ? Où « ses fermes, ses écoles, ses armes, ses médecines, ses maisons collectives, ses tables de montage, ses imprimeries, ses camions bâchés et ses têtes de pont dans les métropoles » vont-elles se cacher ? De telles entreprises n’ont en rien besoin d’être subversives pour être réprimées. De fait, tout est illégal : sans même parler des armes, il est interdit d’exercer la médecine, de travailler, de conduire, sans les diplômes, contrats ou permis correspondants. Même les SEL, les système d’échange locaux, ont un temps été dans la ligne de mire des services fiscaux.
Toutes les communautés alternatives qui ont existé un certain temps ont résolu la question de la même manière, et de fait il n’y en a pas deux. Une expérience comme celle-là ne peut subsister que si elle respecte la légalité du capital. Rien n’interdit à qui en a les moyens de créer des hôpitaux, des écoles ou des fermes collectives privées. Mais en quoi pourrait-on dire de quelque manière que ce soit qu’elles sont « communistes » ?
La condition de la confrontation avec la légalité du capital, c’est de ne pas s’attacher à un lieu, une structure, ou un mouvement durablement, ce qui signifierait sa perte. L’Appel accorde, avec raison, beaucoup d’importance aux lieux : « Pour cela, nous avons besoin de lieux. De lieux où s’organiser, où partager et développer les techniques requises. Où s’exercer au maniement de tout ce qui pourra se révéler nécessaire. Où coopérer » (Proposition V, p.54). De fait, le lieu comme point de rassemblement dans la lutte est un mode d’organisation qui a fait ses preuves. Mais le propre de tels lieux, c’est de devoir sans cesse s’effacer devant la répression qu’ils attirent : quand ils s’éternisent, c’est tout simplement le signe qu’ils ont cessé d’être actifs.
Uno décimo
Une des conséquences regrettables de la manière dont l’Appel envisage, sous le capitalisme, la croissance d’un camp communiste qui se renforce et s’approfondit en s’auto-organisant, c’est que la voix ainsi tracée devient exclusive de toute autre. Le communisme, au lieu d’être produit collectivement et universellement par le prolétariat détruisant le capital dans des formes qu’on ne saurait déterminer à l’avance, se trouve prédéfini par les configurations qu’on entend lui donner aujourd’hui, au cœur même du monde du capital.
Or, la conception qu’on peut avoir actuellement du communisme est elle-même à historiciser, elle est partie prenante d’un stade du développement du capitalisme. C’est ce genre de chose que l’Appel manque totalement. Aussi messianiques que soient les conceptions du communisme dans l’Appel, elles seront toujours le produit du temps présent : et elles manqueront invariablement la richesse possible des définitions du communisme en tant que rapport social universel.
Or, ce communisme comme rapport social universel, s’il existe un jour, sera produit dans des circonstances - la crise généralisée du rapport social, l’insurrection, la destruction totale du capitalisme- dont le déroulement réel nous échappent en grande partie. Quelles seront, alors, les mesures communisatrices, celles qui permettront de produire concrètement le communisme ? On peut certes avoir un avis sur cette question : mais comment admettre que cet avis puisse trancher dès à présent sur ce qui sera ou ne sera pas la communisation ? Même la réflexion sur les exemples historiques les plus intéressants à ce sujet - l’Espagne des années trente, l’Italie des années soixante-dix -ne nous permettra jamais de prédire l’avenir à ce point là.
En appelant à la constitution d’un camp communiste sur les bases de ce qu’il définit dès à présent comme étant le communisme, l’Appel fige sa vision de la communisation. Il est dans la logique de l’Appel de considérer que seules les forces communistes capables de s’auto-organiser dans le capital seront à même de l’emporter demain dans une insurrection ; et que seules sont ces formes communistes celles qui se sont auto-organisées dans le Parti. Bref, comment le Parti, à supposer qu’il se forme sur les bases de ce qui est décrit dans l’Appel, jugera-t-il les évolutions chaotiques des luttes de classe futures ? Il ne les jugera communistes que dans la mesure ou elles le rejoindront, puisqu’il sera lui-même le communisme...
Le Parti ratera tout ce qui se développera dans des formes, des moments et des circonstances qu’il n’aura pas pu prévoir : et il se comportera en censeur de ces formes.
Dès à présent le ton de l’Appel, parfois très cassant, nous donne des indications sur cette coupure entre « bons » communistes, ceux qui ont su faire « sécession », et « mauvais » prolétaires qui ne font rien d’autre que se soumettre au capital. Comme si tous ceux qui n’ont pas d’abord fait « sécession » ne seront jamais à même d’intervenir dans la communisation. De même, l’Appel affirme que ceux qui veulent le communisme doivent cesser de travailler pour le capital. Comment penser qu’on peut créer le communisme en proposant une stratégie révolutionnaire dont la première mesure soit de se couper de ceux qui « travaillent pour le capital », alors même qu’on peut penser qu’une des bonnes raisons pour produire un jour le communisme sera peut-être justement d’avoir, jusque là, « travaillé pour le capital »...?
- Illustration
Duo decimo
L’Appel tombe dans un piège commun pour qui tente de poser la question de la communisation de manière un tant soi peu pratique : les réponses qu’on essaye d’y apporter aujourd’hui semblent délimiter un espace que seuls les véritables révoltés peupleraient, tandis que les autres, ceux qui restent à l’écart de cette révolte, ne composent rien d’autre que le prolétariat intégré au capital.
Un journal publié à Toulouse est assez représentatif de cette manière de penser. Intitulé NOUS, ce fanzine présente sur la couverture de son numéro 7 le dessin d’une personne qui marche en équilibre sur un fil pour franchir le gouffre qui NOUS sépare du monde du capital, représenté par ses usines, ses centrales nucléaires, ses immeubles, ses patrons, ses flics, mais aussi ses travailleurs impuissants et ses téléspectateurs anesthésiés.
À cet égard, la manière dont la première personne du pluriel est employée dans l’Appel n’est pas non plus tout à fait innocente. Certes, l’Appel prend soin de ne pas opposer NOUS et EUX, mais, paraphrasant Heiddegger, NOUS et ON. Le NOUS de l’Appel (comme celui de Toulouse, d’ailleurs) est ouvert : « le NOUS qui s’exprime ici n’est pas un NOUS délimitable, isolé, le NOUS d’un groupe. C’est le NOUS d’une position » (Proposition I, p.8). Mais cette position, c’est celle qui affirme, en quatrième de couverture, que « NOUS AVONS COMMENCÉ ». Ceux qui ont commencé ont déjà avancé sur le chemin de la révolution. C’est explicite dans la formule suivante : « Le renversement du capitalisme viendra de ceux qui seront parvenus à créer les conditions d’autres types de rapports » (Proposition VI, p.65).
L’Appel n’imagine, comme voie vers le communisme, que celle que ses rédacteurs ont eux-mêmes choisi de suivre : c’est là le sens de ce NOUS qui est finalement moins celui d’une « position » que celui d’un parcours. Effectivement, certains de ceux qui se retrouvent actuellement mêlés à « l’aire qui pose la question de la communisation » ont pu vivre une forme de « sécession » : mais une telle rupture s’inscrit dans la logique d’une époque où la communisation est une question marginale. On peut heureusement penser qu’une crise généralisée du rapport social entraînerait d’autres modes d’adhésion à l’idée communiste. La révolution ne sera pas que le fait de squatteurs ou d’anciens squatteurs ! Penser le contraire, c’est croire que la révolution ne l’emportera qu’à la condition que la subjectivité révolutionnaire ait gagné les masses : alors que la révolution sera à la fois le moment de la désobjectivation du rapport social capitaliste et celui de la désubjectivation de la question communisatrice [8].
Tercio decimo
On évite le piège précédemment décrit si on admet que, dans notre époque, toutes les réponses qui peuvent être trouvées à la question de la communisation sont des réponses de notre époque : c’est à dire destinées à se périmer dès que la situation se sera suffisamment modifiée pour qu’une question jusque là minoritaire soit désormais dans toutes les bouches.
La problématique communisatrice, tout comme la conception que l’on se fait du communisme, est elle-même historique. Si le point de continuité entre les luttes actuelles et la révolution est bien la question de la communisation, cette question, déjà diverse dès maintenant, ne peut que s’enrichir de significations nouvelles et de développements imprévus avec l’évolution d’une situation dynamique qui verrait la chute du rapport social capitaliste. Ce ne sont donc pas seulement les réponses à la problématique communisatrice, donc les pratiques, qui se modifieront avec l’arrivée d’une période révolutionnaire, mais bien aussi les questions posées. Tout pratique actuelle qui se voudrait communisatrice devrait donc garder à l’esprit qu’elle répond de manière inadéquate à une question mal posée : ce qui, en même temps, n’enlève strictement rien à sa valeur. Car la question comme la réponse sont inadéquates pour servir de mesure à ce que pourrait être à l’avenir le communisme comme rapport social universel ; mais elles sont tout à fait adéquates pour donner aux luttes actuelles un sens qu’elles ne possèdent pas sans elles, et qui peut se révéler ensuite déterminant pour la possibilité de produire le communisme.
Vouloir mener une lutte tout en s’affranchissant de toutes les médiations mises en place par le capital (les syndicats, la politique, les médias, le droit, etc.) est un exemple évident d’une manière de poser des questions qui ont trait à la communisation [9]. Mais, pourquoi pas, chercher une vie collective et des rapports « différents », à la condition que ce soit dans le contexte de la lutte, peut aussi en être un exemple.
Bien entendu, toutes les pratiques expérimentées alors ne sont en rien communistes, et même elles peuvent être reprises dans un sens qui n’a plus rien de communisateur, comme simples formes réhabitées dans des cadres purement capitalistes. C’est bien le cas des squats qui furent à certains moments une réponse en terme d’organisation et de vie quotidienne à un certain nombre de questions semblables, mais qui peuvent être tout aussi bien un lieu de promotion artistique parmi d’autres. Même chose pour les assemblées générales, les coordinations, les conseils, les occupations d’usines, etc. Toutes ces formes de la lutte peuvent être, à un moment donné, une réponse à une problématique communisatrice, comme elles peuvent être le contraire. L’hypostase d’une de ces formes ne peut que devenir une idéologie.
Quarto decimo
À la formule de l’Appel qui dit : « le renversement du capitalisme viendra de ceux qui seront parvenus à créer les conditions d’autres types de rapports » (Proposition VI, p.65), il faut répondre : « les conditions d’autres types de rapports seront créées par ceux qui seront parvenus à renverser le capitalisme. »
[1] « Communisation : un “appel” et une “invite” » in troploin sept 04. Dauvé termine son texte en écrivant : « Si la situation est telle que la décrivent ceux qui préparent Meeting et ceux qui ont publié Appel, la simple concomitance des projets devrait susciter au minimum un intérêt réciproque chez leurs animateurs respectifs. A notre connaissance, tel n’est pas le cas ». Et il ajoute aussi, concernant l’Appel : « Quelles que soient les réserves qu’il peut susciter, ce livre manifeste une existence, une expérience, en particulier dans les actions anti-mondialisation des dernières années ». Il faut donc préciser ici que la « concomitance » des projets n’a rien de fortuit et que « l’expérience » dont témoignerait l’Appel se trouve aussi dans Meeting. Certains articles de Meeting 1 et l’Appel parlent strictement de la même chose.
[2] Les références aux numéros de pages seront celles de la publication papier de l’Appel, qui se caractérise par son petit format et la couleur marron de sa couverture.
[3] Les expressions « aire qui pose la question de la communisation », « mouvement communisateur » et « courant communisateur » sont reprises dans le sens que je leur avais respectivement donné dans Meeting 1.(« Trois thèses sur la communisation »).
Le « courant communisateur » désigne les groupes théoriques qui reprennent explicitement le concept de communisation comme un pôle important de leur réflexion : ce courant est bien entendu pour le moment très restreint.
« L’aire qui pose la question de la communisation » englobe une part beaucoup plus vaste du mouvement prolétarien passé ou actuel. Il s’agit de caractériser ces moments de la lutte des classes où la problématique centrale était quelque chose de proche de ce qu’on peut à présent entendre par communisation : en gros, comment s’y prendre pour réaliser l’immédiateté des rapports sociaux. Ce qui signale l’existence de cette aire, c’est la cristallisation autour de la question communisatrice à un moment donné et dans une lutte donnée : on ne saurait penser que cette portion du prolétariat en lutte puisse exister à part ou se perpétuer en dehors de la lutte des classes en général.
Enfin, le « mouvement communisateur » est quelque chose qui reste à créer. Il s’agit de susciter un débat au sein de « l’aire » - donc, dans les luttes et les moments où la problématique communisatrice semble se faire jour - pour que se forme un mouvement qui expliciterait cette problématique au sein des luttes.
[4] Dauvé, op.cit.
[5] On comptera quelques échanges de coups avec les flics, quelques bris de vitrines et caméras, quelques halls d’hôtels saccagés, et beaucoup de bordel en centre-ville - et aussi pas mal d’interpellations, quelques procès (dont un manifestant condamné à quatre mois fermes) et un arrêté de la préfecture du Rhin qui interdisait toute manifestation en centre-ville.
[6] Village Alternatif Anticapitaliste et Anti-guerre, à l’occasion du sommet du G8 à Evian en juin 2003. On trouve d’ailleurs une critique du VAAG dans l’Appel, p.19.
[7] « Un meeting permanent ? Sans blague ! », François Danel
[8] Voir le nota bene de « trois thèses sur la communisation », Meeting 1
[9] Je parle de « questions » parce que chaque pratique, dans ce type de lutte, est une tentative de répondre à un problème particulier.
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